Convaincu de son bon droit, un franchisé en difficultés résilie son contrat avant son terme. La cour d’appel de Paris le condamne pour rupture fautive. Le caractère brutal de la séparation ne se traduit pas, en revanche, par une indemnité supplémentaire.
La cour d’appel de Paris vient de condamner un franchisé pour avoir résilié son contrat avant son terme.
Dans ce litige, le contrat de franchise est signé pour 5 ans en mars 2013. Assez vite le franchisé – l’un des premiers du réseau – rencontre des difficultés, cesse de payer ses redevances et, fin 2014, résilie son contrat en prévenant son partenaire deux jours avant seulement (au lieu des 6 mois prévus). Le franchiseur l’assigne en justice pour rupture brutale et fautive et le tribunal de commerce de Paris le condamne.
Pour sa défense, le franchisé invoque en appel sa cessation d’activité. Un des cas prévus, selon lui, par le contrat, pour autoriser sa résiliation anticipée. Il ajoute que, « s’étant ouvert (très tôt) à son franchiseur de ses difficultés financières, celui-ci ne s’est pas trouvé au dépourvu, de sorte que le préavis de résiliation devenait sans objet ». En outre, le franchiseur a, en septembre 2014, réduit la zone d’exclusivité initialement accordée (deux départements) et y a introduit un nouveau franchisé «de sorte qu’il ne peut invoquer aucun effet de surprise à l’origine de sa désorganisation et d’un éventuel manque à gagner ».
La résiliation fautive du contrat de franchise sanctionnée
La cour d’appel de Paris (Pôle 5, chambre 4) ne fait pas sienne la totalité de ces arguments.
Dans son arrêt du 28 février 2018, elle relève d’abord que la « cessation volontaire d’activité » du franchisé ne faisait pas partie des conditions de son contrat l’autorisant à une résiliation anticipée.
Pour les magistrats, sa rupture est donc injustifiée et ils confirment sa condamnation à 3 000 € de redevances impayées.
Ils y ajoutent 3 000 € de dommages et intérêts pour « utilisation (prolongée et) non autorisée de la marque » et lui ordonnent d’en cesser tout usage.
La cour condamne en outre le franchisé à 5 000 € de dommages et intérêts pour le préjudice qu’il a fait subir au franchiseur du fait de sa rupture anticipée (dont 2 000 € pour sa participation prévue, mais perdue, au budget communication de l’enseigne et 3 000 € pour les redevances (de 10 % du CA) qui auraient été perçues si le contrat s’était prolongé jusqu’à son terme (1).
Un total de 11 000 € à rapporter au chiffre d’affaires d’à peine plus de 18 000 € réalisé en 20 mois par le franchisé condamné.
Pas d’indemnité supplémentaire pour rupture brutale
Quant au caractère brutal de la rupture, invoqué par le franchiseur « au regard de la durée des relations commerciales et de leur pérennité », la cour ne lui accorde pas d’indemnisation.
Pour elle, il n’y a pas en l’occurrence, de « flux d’affaires » entre les parties « au sens de l’article L 442-6,I,5° du code de commerce », (pas de vente de produits). Et rien ne prouve que les partenaires auraient poursuivi leur collaboration au-delà du contrat de 5 ans.
A noter : le contrat de franchise concerné ne prévoyait pas d’indemnité en cas de résiliation aux torts du franchisé. Ce qui aurait pu alourdir encore l’addition pour le plaignant.
(1) A propos des redevances, la cour écarte le calcul du franchiseur basé sur le CA moyen de plusieurs franchisés. Seul le CA réalisé par le plaignant est pris en considération. La cour arrondit en outre cette somme à la baisse afin de tenir compte de « l’installation d’un nouveau franchisé sur la zone » et de « l’alea inhérent à la vie des affaires » surtout sur une période longue (39 mois).