Dans un litige Dépil Tech, une cour d’appel vient de prendre position à contre-courant de la jurisprudence de la Cour de cassation. Pour les magistrats d’Aix-en-Provence, l’activité d’épilation par lumière pulsée de cette franchise n’est pas illicite.
Une franchisée Dépil Tech qui réclamait la nullité de son contrat pour objet illicite et le remboursement de son droit d’entrée vient d’être déboutée de ses demandes. C’est ce qu’a décidé, le 20 décembre 2018, la cour d’appel d’Aix-en-Provence.
Dans ce litige, la franchisée reçoit son DIP le 13 novembre 2014 et signe son contrat le 4 décembre en versant un droit d’entrée de 26 400 euros. Puis, elle cherche son financement pour l’ouverture d’un institut à l’enseigne dans un beau quartier de Paris. En vain. Entre mars et juillet 2015, toutes les banques contactées l’informent par écrit de leur refus. D’où son action en justice contre le franchiseur.
Pour la franchisée, c’est évident au vu de son apport personnel (d’environ 30 % de l’investissement initial) et de la qualité de son business-plan : les 6 banques ont refusé son financement en raison de l’enseigne et pas de son dossier. L’une d’elle, mentionnée dans le DIP comme banque partenaire du franchiseur, l’a même précisé par écrit.
Pour elle, comme elle en a pris conscience au cours de sa recherche d’emprunt, son contrat est nul car l’objet en est illicite puisqu’un arrêté de 1962 interdit en France aux non-médecins de pratiquer l’épilation autrement qu’à la cire ou à la pince. En outre, plusieurs décisions de justice ont confirmé le caractère illégal de l’épilation à la lumière pulsée. La franchisée estime également avoir été trompée sur la rentabilité réelle du concept.
A l’appui de la décision : le Règlement européen du 5 avril 2017 sur les dispositifs médicaux
Saisie, la cour d’appel d’Aix-en-Provence déboute la franchisée de ses demandes. Reprenant l’argumentation de Dépil Tech, les magistrats considèrent que :
-1.« Concernant la dépilation par lumière pulsée, les textes contradictoires du code de la santé publique régissant ce domaine doivent être interprétés à la lumière du Règlement européen UE 2017/745 du 5 avril 2017 adopté qui sera prochainement applicable dans le secteur des appareils litigieux, notamment son article XVI paragraphe 5, qui n’assimile pas aux actes médicaux les équipements à lumière pulsée utilisés sur le corps humain. »
-2.« De nombreux centres d’épilation à lumière pulsée sont ouverts sans que les pouvoirs publics en interdisent l’activité et des appareils d’épilation à lumière pulsée sont en vente libre auprès du public »,
-3. « Aucun décret d’application (…) n’est intervenu pour interdire l’usage des appareils à lumière pulsée à visée esthétique. »
Les magistrats estiment par ailleurs qu’il n’est « pas justifié que les refus de financement des banques (…) soient liés directement et exclusivement à l’activité envisagée par l’emprunteuse ».
En conséquence, la cour d’appel d’Aix-en-Provence (2ème chambre) confirme le jugement du tribunal de commerce de Nice du 12 décembre 2016 selon lequel « le caractère illicite de l’activité du contrat de franchise n’est pas établi ». Le contrat n’est donc pas annulé.
La tromperie sur la rentabilité est également écartée.
Quant au droit d’entrée, qui « correspond (à l’accès) au savoir-faire et au droit d’utiliser la marque Dépil Tech », il « n’était pas lié à l’obtention d’un financement et reste donc acquis à la société Dépil Tech».
Une décision contraire à la jurisprudence de la Cour de cassation
Le Règlement européen du 5 avril 2017, qui assimile l’épilation à la lumière pulsée à une activité non-médicale vient aussi d’être invoqué par la chaîne de franchise Dépil Tech dans sa récente saisine du Conseil d’État. La réponse n’est, toutefois, pas attendue avant 2020.
Quant à la Cour de cassation, si elle n’a pas eu encore à se prononcer précisément sur l’impact de ce nouveau texte sur le secteur, elle a toujours suivi la même ligne, réaffirmée en décembre 2016 et en mars 2018, selon laquelle la seule législation à prendre en compte en matière d’épilation à la lumière pulsée était bien celle de l’arrêté de 1962.
Si, comme c’est assez probable, la plus haute juridiction française est saisie par la franchisée dans ce litige, sa décision sera très attendue par les acteurs de ce secteur.