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      La nullité d’un contrat de franchise rejetée malgré un DIP absent et un savoir-faire contesté - Brève du 4 janvier 2021

      Brève
      4 janvier 2021

      Un franchisé reprochait à son ancien franchiseur d’avoir vicié son consentement en ne lui délivrant pas de DIP et de ne lui avoir transmis aucun savoir-faire ni prodigué suffisamment d’assistance. La cour d’appel de Versailles lui refuse la nullité de son contrat.

      cour d’appel de Colmar – Alsace – FranceLa cour d’appel de Versailles a refusé, par un arrêt du 19 novembre 2020, d’accorder à un franchisé la nullité de son contrat qu’il réclamait pour dol, erreur et absence de cause.

      Dans ce litige, une première convention est signée en juin 2013 et le point de vente ouvert en janvier 2014. Après négociations, les parties s’entendent sur une légère modification du nom d’enseigne utilisé par l’établissement. Mais rapidement les relations se dégradent et, moins de huit mois après la signature de la dernière version du contrat, le franchisé le résilie oralement, invoquant un manque d’accompagnement.

      En août 2014, le franchiseur donne son accord écrit à la résiliation tout en contestant le manque d’assistance dont il est accusé. Il réclame au franchisé le paiement de la moitié du droit d’entrée non encore versé mais renonce à facturer les redevances sur l’ensemble de la période.

      Près de trois ans plus tard, en juillet 2017, le franchisé assigne son ex-franchiseur devant la justice afin d’obtenir la nullité du contrat. Il estime entre autres qu’aucun savoir-faire ne lui a été transmis et que son consentement a été vicié pour défaut d’information précontractuelle. Il demande le remboursement de ses investissements et d’importants dommages et intérêts pour le préjudice subi.

      Ni dol, ni erreur : pas de vice du consentement du franchisé selon les juges

      Saisie, la cour d’appel de Versailles ne partage pas son analyse. Les magistrats reconnaissent, certes, que le franchiseur ne prouve pas avoir fourni un DIP (Document d’information précontractuelle) et que le « document de référence » qu’il affiche en permanence sur son site internet ne saurait suffire à remplir ses obligations légales d’information précontractuelle (entre autres sur l’état du marché local et du réseau).

      Mais à leurs yeux le franchisé ne démontre pas pour autant qu’il n’aurait pas signé le contrat s’il avait eu connaissance de ce DIP. Au contraire, relèvent les juges, puisqu’il écrit que, dans ce cas, il « aurait pu choisir en connaissance de cause s’il était pertinent d’intégrer le réseau de franchise ». Une formulation qui, selon eux, « laisse entrevoir que, même en possession de l’information précontractuelle », il aurait peut-être choisi quand même d’intégrer le réseau… Subtil distinguo. Le caractère déterminant de l’absence d’information précontractuelle n’étant selon eux pas établi, le dol est écarté.

      La cour refuse également d’accorder la nullité pour erreur provoquée, selon le franchisé, par les omissions du franchiseur qui l’ont, selon lui, « privé de la possibilité d’apprécier la réalité des perspectives économiques attendues. » Pour les magistrats, le franchisé n’invoque aucune erreur précise qu’il aurait commise pendant ses huit mois d’exploitation, qu’il s’agisse « de ses perspectives de développement ou de sa situation financière ». Il « n’allègue pas » pointe la cour, par exemple, « que le budget prévisionnel aurait été impossible à réaliser ». « L’absence d’information précontractuelle ne suffit pas à elle seule à caractériser l’existence d’une erreur consécutive », résument les juges.

      Ni absence de savoir-faire, ni défaut d’assistance du franchiseur selon la cour

      Devenir-Franchise-DIPReste l’absence de cause du contrat. Pour le franchisé, aucun savoir-faire n’a été transmis. La preuve ? Le franchiseur a accepté de modifier le nom de l’enseigne arboré par l’établissement franchisé sans aucune autre modification de l’aménagement du local, de l’identité visuelle ou du contrat. Ce qui montre bien, à son avis, qu’il n’y avait « pas de concept spécifique ni de savoir-faire original. » En outre, les réseaux du franchiseur aux couleurs de l’une ou l’autre des deux premières enseignes envisagées pour ce contrat étaient, toujours selon le franchisé, « inexistants ou quasi-inexistants » au moment où il s’est engagé.

      Pour la cour, au contraire, « le fait que le franchiseur propose deux enseignes distinctes à ses franchisés est insuffisant à caractériser l’absence de savoir-faire ou d’originalité de celui-ci, rien n’empêchant de décliner un même concept original en deux enseignes légèrement distinctes. »

      En outre – observent les juges – le franchiseur a annexé au contrat de franchise le sommaire du manuel de savoir-faire. Manuel à propos duquel le contrat précise qu’il a été remis au franchisé, ce dernier s’engageant à le suivre.

      Quant à l’assistance que le franchisé estime ne pas avoir reçue, des échanges de courriels prouvent aux yeux des magistrats qu’elle a été délivrée, notamment au moment de l’ouverture du point de vente. Enfin le groupe franchiseur « justifie avoir compté, pour l’une des enseignes, un réseau de 33 unités en France en 2014 ».

      Pas de nullité du contrat de franchise

      La cour rejette donc la nullité du contrat pour absence de cause. Ainsi que les demandes de remboursement et de dommages et intérêts du franchisé dépendantes de la nullité.

      Par ailleurs, dans la mesure où le franchisé a utilisé la marque du franchiseur pendant les premiers mois de 2014, la cour estime qu’il doit s’acquitter du paiement correspondant au solde du droit d’entrée réclamé par l’enseigne (18 000 € TTC).

      En revanche, puisque dans son courrier d’août 2014 le franchiseur acceptait la résiliation du contrat sans facturer les redevances, celles-ci ne seront pas dues.

      Et même si la cour juge « surprenante » l’attitude du franchisé qui a attendu près de trois ans pour formuler des griefs à l’encontre de son franchiseur, les magistrats n’estiment pas que cela constituerait de la part du plaignant un « abus du droit d’ester en justice ». Il ne sera donc pas sanctionné pour cela, contrairement à ce que réclamait le franchiseur.

      Référence de la décision :

      Cour d’appel de Versailles, 12è chambre, 19 novembre 2020, n°19/01483

      Lire aussi sur le sujet :

      L’analyse d’Anouk Bories, maitre de conférences à l’université de Montpellier dans la Lettre de la distribution de décembre 2020 (Pages 5 et 6)