Lors du renouvellement de son contrat, un franchisé se voit proposer une réduction de sa zone d’exclusivité territoriale. Estimant que ses difficultés ultérieures proviennent de ce changement et de l’implantation d’un nouvel établissement en franchise à proximité du sien, il assigne son franchiseur en justice. La cour d’appel de Paris le déboute.
La cour d’appel de Paris a tranché le 24 mars 2021 un litige survenu entre un franchiseur et un de ses ex-franchisés à l’occasion du renouvellement de son contrat.
Dans cette affaire, la première relation de 5 ans est conclue en octobre 2009 avec une clause d’exclusivité territoriale portant sur plusieurs cantons et comprenant trois villes de 30 à 50 000 habitants.
Fin 2014, les parties signent un nouveau contrat aux conditions quasi-identiques, sauf la clause d’exclusivité, réduite à cinq communes autour d’une seule ville de 30 000. Parallèlement, le franchiseur implante un autre franchisé dans la plus grande des trois cités estimant que cette zone n’a pas été suffisamment exploitée précédemment.
En cause : la réduction de la zone d’exclusivité territoriale…
Dès 2012, le franchisé en litige connaît des difficultés dans son activité. Sa situation s’améliore toutefois en 2015. Mais en juin 2017, estimant qu’il souffre de la concurrence de son nouveau collègue, il met en demeure son franchiseur de remédier à cette situation et stoppe tout paiement de redevances.
Début 2018, sa société est mise en liquidation amiable et cesse son activité puis, en mai 2019, est placée en liquidation judiciaire. Entre-temps, le franchisé a assigné son ex-partenaire en justice réclamant la résiliation de son contrat aux torts du franchiseur et des dommages et intérêts significatifs. Débouté par le tribunal de commerce de Paris, il fait appel.
… Et l’implantation d’un nouveau franchisé à proximité du premier
Devant la cour d’appel de Paris le liquidateur judiciaire qui a pris le relais du franchisé estime que celui-ci a été victime de déloyauté.
Le contrat de 2009 prévoyait en effet selon lui « une clause de reconduction semi-automatique » à des conditions identiques. Et il en déduit qu’en fait le contrat s’est prolongé tacitement après son terme « jusqu’à ce que le franchiseur, avec une particulière mauvaise foi, fasse signer au franchisé (en décembre 2014) un nouveau contrat avec un territoire réduit sans l’avertir de l’arrivée d’un nouveau franchisé ».
Le franchiseur aurait en outre organisé la promotion de ce nouvel arrivant dans toute la région et de lui seul et n’aurait pas accompagné le franchisé alors qu’il était au courant de ses difficultés.
Pour la cour, le franchisé ne peut pas reprocher au franchiseur de développer son réseau comme il l’entend
La cour d’appel n’a pas la même lecture des faits. Citant le contrat de 2009, les magistrats de Paris font observer que s’il prévoyait bien un renouvellement « aux mêmes conditions initiales à l’exception de la redevance de franchise », le texte précisait aussi que c’était au franchisé de faire la demande du nouveau contrat et de se prononcer sur son contenu au plus tard trois mois avant la fin du contrat initial. Or, la société franchisée n’a pas fait cette demande et « ne peut (donc pas) se prévaloir d’une tacite reconduction du contrat après son terme initial ».
Par ailleurs, les magistrats estiment, au vu des pièces qu’ils ont examinées, que le franchisé a accepté de signer son deuxième contrat de décembre 2014 « en toute connaissance de cause » (notamment sur la réduction de sa zone d’exclusivité) et qu’il « ne peut reprocher au franchiseur dont la mission essentielle est d’animer et de développer son réseau de franchise d’avoir permis l’implantation concomitante d’un nouveau franchisé hors de (sa nouvelle) zone d’exclusivité territoriale. »
Le contrat est résilié, mais aux torts du franchisé qui n’a pas payé ses redevances
La cour d’appel juge également non démontrées les accusations concernant les inégalités de promotion entre le nouvel arrivant et l’ancien franchisé.
Ils ajoutent que la baisse du CA du franchisé entre 2015 et 2016 ne peut être imputée à la concurrence du nouvel arrivant puisque c’est précisément en 2015, lors de l’installation de celui-ci dans la région, que l’ancien franchisé a réalisé son meilleur chiffre d’affaires…
Pour la cour, le franchiseur n’a donc pas manqué à ses obligations contractuelles. Le contrat n’est pas résilié à ses torts. En revanche, elle confirme le jugement de première instance qui l’a résilié aux torts du franchisé pour cause de redevances non réglées.
Les sommes de 615 € pour les redevances impayées et de 3 151 € pour les redevances qui auraient été dues si le second contrat était allé à son terme sont inscrites au passif de la société franchisée comme dues au franchiseur.