Fermer
Secteurs / Activités

      Lorsqu’un franchiseur fait évoluer son savoir-faire en cours de contrat, le franchisé doit le suivre - Brève du 12 mai 2022

      Un franchiseur apporte à son concept une évolution importante afin, selon lui, de tenir compte des coûts de production et de l’évolution des attentes de la clientèle. Invoquant une modification unilatérale de son contrat, un franchisé refuse de le suivre et s’adresse à la justice. Il est débouté et condamné.

      Contract signatureDans ce litige, le contrat de franchise est signé en mars 2015 pour l’ouverture un mois plus tard d’une boutique spécialisée. En 2017, le franchiseur, dont la société a changé de propriétaire, avertit ses franchisés d’une modification de son offre de produits : désormais, ils devront être proposés en vrac à la clientèle et non plus sous emballages conditionnés.

      Le franchisé s’en plaint, estimant qu’il s’agit là d’une modification unilatérale du contrat de franchise. Il accuse aussi le franchiseur de lui avoir imposé l’achat d’un mobilier onéreux afin de le rendre conforme à la nouvelle présentation des marchandises. Une médiation est tentée, mais échoue. En décembre 2018, la société franchisée assigne le franchiseur en justice.

      Formulant également d’autres reproches en matière d’information précontractuelle et d’accompagnement par le franchiseur, la société franchisée réclame la résiliation judiciaire du contrat de franchise et au total plusieurs centaines de milliers d’euros au titre, notamment, du remboursement du droit d’entrée de 18 500 €, des redevances versées à hauteur de près de 62 000 €, de son emprunt de 105 000 €, de l’apport personnel des deux franchisés associés pour 70 000 € et du rachat du stock pour 20 000 €. Plus 90 000 € de dommages et intérêts pour chacun des franchisés.

      Pour la société franchisée, il y a eu « violation du concept » initial. Pas pour la cour d’appel

      Saisie, la cour d’appel écarte les accusations concernant l’information précontractuelle et l’obligation d’assistance du franchiseur. Elle fait de même en ce qui concerne la « violation du concept arrêté entre les parties ».

      D’abord, notent les juges, le franchisé « ne démontre pas que le concept (objet du contrat) impliquait la vente des produits de façon conditionnée ». Le DIP fait au contraire « allusion » au moins dans un cas « à une possibilité de vente en vrac ».

      Ensuite, au vu des pièces examinées, les magistrats relèvent que « le choix de remplacer la vente de produits conditionnés par des produits en vrac est une évolution du savoir-faire, justifiée par les coûts de production et l’évolution (des attentes) de la clientèle. »

      En ce qui concerne le mobilier, il se trouve que, dérogeant à la règle générale suivie dans son réseau, le franchiseur a proposé au franchisé en novembre 2018 de lui en financer une partie.

      Par ailleurs, la cour considère que, contrairement à ce qu’affirme le franchisé, le franchiseur ne lui a pas imposé l’arrêt de la vente de certains produits complémentaires. Si le franchiseur a revu cette partie de sa gamme, il n’a pas pour autant « modifié unilatéralement le concept ». Même remarque pour des activités connexes dont il a simplement recommandé l’abandon.

      Enfin, les juges soulignent que le plaignant « ne démontre pas que le changement de stratégie du franchiseur a eu, pour le franchisé, de réelles conséquences sur son chiffre d’affaires. »

      La résiliation judiciaire du contrat est prononcée aux torts du franchisé

      Devenir-Franchise-Loi-DoubinPour la cour, la conclusion s’impose : la société du franchiseur « ne s’est pas unilatéralement affranchie de ses obligations contractuelles ». Le franchisé est débouté de ses demandes et la cour confirme la résiliation judiciaire du contrat prononcée à ses torts par le tribunal de commerce le 12 juin 2020.

      En conséquence, la société franchisée est condamnée à verser à son ex-franchiseur 11 500 € de redevances dont elle aurait dû s’acquitter (à compter du 12 juin 2020) si le contrat s’était prolongé jusqu’à son terme en mars 2022. Elle doit aussi régler un peu plus de 28 000 € de factures impayées.

      Référence de la décision :

      Cour d’appel de Rouen, chambre civile et commerciale, 30 mars 2022, n° RG 20/01964