Pays doté d’une forte culture de la franchise, la France attire, chaque année, plusieurs dizaines d’enseignes étrangères, bien décidées à se faire, sur notre sol, une place au soleil.
On compte en France, depuis 2015, près de 2 000 franchises (elles étaient seulement 550 en 2000). Quand certaines disparaissent ou sont placées en liquidation judiciaire (Habitat, Camaïeu et San Marina en 2023), d’autres s’implantent, dont une part non négligeable d’étrangères, bien décidées à prendre une part du gâteau dans un univers français de la franchise qui pèse désormais près de 80 Mds€ de chiffre d’affaires.
Et parmi les secteurs qui aiguisent le plus les appétits figure celui de la restauration, avec en tête les segments de marché du snacking, de la street food et des concepts de restauration dits de « loisirs » (cafés, glaces, desserts…). Pourquoi un tel engouement pour la restauration, à l’inverse d’un secteur du prêt-à-porter qui, lui, ne fait plus recette ? « Car nous avons tous besoin de manger quatre fois par jour ! », répond David Borgel. Avant d’ajouter : « Mais attention, pour réussir, il faut apporter un concept novateur. La pizza, les sushis ou les burgers en franchise, c’est dépassé. Il faut savoir prendre des risques en innovant. »
Restauration : le Chilien Astoria vise Paris, Marseille et Montpellier
Parmi les nouveaux concepts de restauration qui font les yeux doux à la France figure l’enseigne chilienne Astoria. Fondée en 2009 et présente dans les centres commerciaux les plus importants du Chili, elle propose des sandwichs chiliens traditionnels préparés sur commande à partir de recettes chiliennes. « Nous ne sommes pas encore établis en France, mais pour y parvenir nous travaillons avec David Borgel, confie Anthony Bailey, en charge de son expansion sur les marchés internationaux. Pour ce faire, nous cherchons idéalement un master franchisé. Mais nous sommes également ouverts à la possibilité d’un accord régional, bâti sur un plan de développement, afin d’ouvrir un nombre de restaurants déterminé. » Et pourquoi Astoria a-t-il choisi l’Hexagone pour son déploiement à l’international ? « Après l’Arabie saoudite et la Mongolie où nous opérons déjà, nous voulons étendre nos opérations en Europe. Et nous sommes convaincus que l’Espagne et la France offrent, sur le continent, les meilleures opportunités de développement de notre enseigne, ajoute-t-il. S’agissant spécifiquement de la France, son cosmopolitisme est un réel atout pour nous accueillir. De plus, sa communauté latine, importante, devrait être, nous en sommes certains, réceptive à une nouvelle marque chilienne. » Et ce dernier de compléter : « Notre principale ville-cible pour la France reste Paris. Ensuite viennent Marseille et peut-être Montpellier. Mais nous demeurons ouverts à toutes les villes du pays, aussi bien avec un format de restaurant classique qu’avec des food trucks. »
Activités sportives : Fit20 table sur plusieurs centaines de franchisés
Autre secteur de la franchise qui a le vent en poupe : celui dédié aux activités sportives et à la santé. Comptabilisant plus de 60 franchises déjà implantées sur le territoire, il compte un petit nouveau depuis peu : le Hollandais Fit20. Doté d’un premier studio franchisé situé près de Disneyland Paris, il propose, à ses clients, un modèle d’entrainement dit « de résistance à haute intensité », appelé aussi HIT (High Intensity Training). « Notre méthode, basée sur des mouvements très lents poussés jusqu’à l’échec musculaire momentané, révolutionne le milieu de la forme et du bien-être », affirme son PDG, Walter Wendel. Et avec Fit20, à raison de seulement 20 minutes d’exercice par semaine, pas besoin de se changer ou de se doucher après l’effort. Aussi, une tenue de sport n’est pas nécessaire pour fréquenter ses studios. « Si nous avons choisi la France pour nous déployer à l’international, c’est parce que ce pays, qui est un grand marché, est pourvu d’une culture de la franchise de longue date, explique Walter Wendel. De plus, j’ai le sentiment que la France est plus réceptive qu’hier aux marques étrangères. Un esprit plus ouvert s’y développe. Mais pour nous y implanter, nous devons maintenant trouver le bon master franchisé, c’est-à-dire un professionnel qui a fait ses preuves dans le monde des affaires, et de préférence dans les services ou le commerce affilié. » Sur le plan de ses ambitions de croissance en France, le PDG de Fit20 annonce : « Nous comptons, aux Pays-Bas, 115 studios et nous prévoyons une croissance de 200 à 300 unités au cours des dix prochaines années. Or, la France, avec ses 68 millions d’habitants, nous laisse penser que notre potentiel de développement y est au moins trois fois supérieur. En conséquence, nous tablons, à horizon 2034, sur l’ouverture de plusieurs centaines de franchisés Fit20 dans votre pays. » Et si les ambitions de croissance qu’il nourrit sont si fortes, c’est, d’autre part, parce que son enseigne est positionnée sur un segment de marché qui vise une cible de clients encore peu adressée : les personnes de 40 ans et plus, alors que, dit-il, « la plupart des autres réseaux spécialisés dans le conditionnement physique s’adressent principalement aux jeunes et aux femmes. » Autre atout de l’enseigne mis en avant par son fondateur : « Le faible encombrement de nos studios, développés en BtoB ou en BtoC, qui peuvent prendre place dans un local commercial, un immeuble de bureaux, un centre de santé ou un club de golf. »
Immobilier : les grandes ambitions du Belge We Invest
Souvenons-nous : dopé par des taux de crédits immobiliers au plus bas (entre 0 et 1 %), le marché immobilier hexagonal s’envolait en 2021 et 2022. Mais en 2023, avec des emprunteurs, qui voyaient leur capacité d’emprunt chuter de 20 %, ce qui a représenté, en moyenne, une perte de pouvoir d’achat de 40 000 €, le secteur immobilier se grippait. Les franchises immobilières françaises commencèrent alors à grimacer.
Pas de quoi, pour autant, refroidir aujourd’hui les ardeurs de la franchise immobilière belge We Invest, bien décidée à se faire une place au soleil en France. « Un marché en difficulté est un marché d’opportunité. Nous arrivons dans l’Hexagone en apportant de la fraîcheur au secteur », affirme Xavier Belvaux, le directeur général de sa filiale française, qui annonce, après l’ouverture de sa première agence vitrée à Boulogne-Billancourt (92), le déploiement de son modèle, à partir du 1er mars 2024. « En plus de nous appuyer sur une centaine de mandataires indépendants, nous visons 30 agences vitrées en franchise dès cette année en France, table ce dernier, pour atteindre, à horizon 2027, les 150 points de vente et quelque 600 mandataires ».
Mais ce dernier de reconnaître : « Oui, c’est compliqué pour une franchise étrangère de s’implanter dans l’Hexagone. La concurrence y est forte et, par rapport à la Belgique, les contraintes juridiques sont différentes. Nous devons aussi sélectionner soigneusement nos prestataires, qui sont différents d’un pays à l’autre, et notamment nos fournisseurs de logiciels de transaction et de gestion locative. » Si bien que, pour ne pas se louper, une franchise étrangère doit, selon lui, obligatoirement s’appuyer sur un expert national du pays où elle s’installe. C’est un avis également partagé par David Borgel : « La France est un pays concurrentiel, avec des franchises dynamiques, et où le commerce organisé est fortement représenté, observe-t-il. Alors certes, elle reste attractive pour les acteurs étrangers, mais il est primordial, pour s’y implanter, de bien connaître son marché. Et d’être sur place ! Pour résumer, trouver un bon master franchisé s’avère primordial, c’est-à-dire quelqu’un qui connaît bien le pays, opérationnel, bien entouré et fortement impliqué dès le démarrage de l’activité. » Et notre expert de délivrer deux derniers conseils : réaliser, avant son implantation, une solide étude de marché ; et parler l’anglais (ou, tout du moins, disposer dans son équipe d’un associé familier avec la langue Shakespeare). « Quand un projet d’importation de franchise en France tombe à l’eau, c’est bien souvent à cause de la barrière de la langue », constate David Borgel. « C’est vrai, cette barrière perdure encore, rejoint Walter Wendel, chez Fit20. Mais les jeunes français parlent mieux l’anglais que leurs ainés. » Tous les espoirs sont donc permis !
De la nécessité, ou non, d’adapter son modèle à la France
Les franchises étrangères sont-elles contraintes de déployer un concept spécifiquement adapté à notre pays pour s’y développer ? Doivent-elles adapter leur modèle ? « Non, dans environ 80 % des cas, tranche David Borgel (cabinet Franchise-Me Up). En France, nous sommes tolérants sur la nature des concepts déployés. Nous n’imposons pas d’aménagement spécifique aux franchises étrangères. » Exception faite pour la franchise américaine Randy’s Donuts : « Aux États-Unis, elle s’appuie sur de vastes boutiques de près de 300 m2. Or, en France, ce format ne serait pas rentable. C’est pourquoi nous travaillons, pour son déploiement dans l’Hexagone, sur un format plus petit, d’environ 30 m2. »