Nous sommes prêts à accueillir le plus professionnellement possible ceux qui voudront nous rejoindre en tant que franchisés.
A partir de quand et pourquoi vos enseignes Bricomarché et Brico Cash, historiquement développées en coopérative, vont-elles faire appel à la franchise ?
Aujourd’hui, le Groupement Les Mousquetaires s’ouvre officiellement à la franchise, à la demande de la branche ITM Equipement de la Maison, que je préside, même si le pôle alimentaire (enseignes Intermarché et Netto) est lui aussi intéressé. En effet, lors du rachat en 2018 de l’enseigne Bricorama, nous avons découvert la franchise de façon réelle, puisque ce réseau comporte 34 franchisés, essentiellement implantés outre-mer, mais aussi en métropole. Or ces franchisés sont des chefs d’entreprise comme nous : moteurs dans leur activité de commerce et bons commerçants, avec l’envie d’avancer. Pour preuve, lors de la crise Covid, les premiers magasins rouverts ont été ceux exploités par des chefs d’entreprise indépendants, bien avant les réseaux intégrés.
Les franchisés Bricorama et les adhérents de notre groupement ont des contrats différents, mais tous sont de vrais indépendants. C’est pourquoi nous avons décidé de faire évoluer notre recrutement. En effet, le modèle Mousquetaires convient bien à un primo-accédant qui adhère à une vision collective, et accepte de remettre une partie de son indépendance dans une corbeille commune, qui s’appelle l’interdépendance, car cela nous permet de mettre des moyens en commun pour faire ensemble des choses qu’on ne pourrait pas faire seuls, comme par exemple construire une base logistique.
« La franchise concerne toutes nos enseignes, même si, au sein de la branche bricolage, nous étions demandeurs depuis deux ans. »
Mais parmi les franchisés déjà à la tête d’un ou plusieurs magasins, il y a de très bons commerçants que ne sont pas obligatoirement intéressés par le fait de diriger l’entreprise collective, ni de participer à son évolution. De plus, certains ont une histoire particulière, qui entraîne une dilution du capital de l’entreprise entre des enfants, des frères et sœurs, des parents qui leur ont parfois légué une histoire familiale de cent ans… Dans ce cas, juridiquement plus complexe que dans le cas d’un primo-accédant, il est beaucoup plus simple d’avoir un contrat de franchise qui tient en quelques pages qu’un contrat de modèle coopératif comme on peut en trouver chez Les Mousquetaires. En outre, depuis plusieurs années, certains adhérents Mousquetaires, notamment dans l’alimentaire, ont développé des activités complémentaires dans d’autres secteurs, sous d’autres enseignes, y compris sous contrat de franchise.
C’est pourquoi, il y a deux ans, nous avons recruté Jean-François Martinez, ancien directeur franchise de La Foir’Fouille, pour construire un modèle de franchise adapté à nos enseignes, dans le cadre d’une démarche collective qui a été acceptée par nos adhérents. Aujourd’hui, comme annoncé par Thierry Cotillard, Président du Groupement Les Mousquetaires, nous sommes prêts à accueillir le plus professionnellement possible ceux qui voudront nous rejoindre en tant que franchisés. Et cela concerne toutes nos enseignes, même si, au sein de la branche bricolage, nous étions demandeurs depuis deux ans.
Quels sont vos objectifs de développement en franchise ?
Notre objectif est de démarrer doucement, avec une quinzaine de magasins sur 2025, puis de viser 100 magasins en franchise à cinq ans. Cela concerne nos trois enseignes : Bricomarché, Bricorama et Brico Cash, en France métropolitaine et outre-mer, mais pour l’instant, la Pologne et le Portugal, où nous sommes également présents, ne sont pas demandeurs.
A quels profils de candidats s’adresse cette nouvelle formule de recrutement ?
La France est un marché plus mature et plus dense que d’autres pays européens et, du fait des nouvelles réglementations en matière d’implantations commerciales, il va devenir compliqué d’y trouver des sites pour créer de nouveaux magasins. C’est pourquoi la franchise va nous permettre de proposer à des commerçants indépendants déjà en activité de nous rejoindre. Par exemple si, dans une ville de taille moyenne qui correspond bien au concept Bricomarché, il existe déjà un indépendant, nous pourrons lui proposer de prendre l’enseigne Bricomarché. Autre exemple : dans un arrondissement de Lyon ou de Marseille où nos enseignes ne sont pas présentes, nous pourrons proposer à des indépendants de prendre l’enseigne Bricorama, qui est leader des cœurs de ville en France. Enfin, nous pourrons proposer à un magasin Mr. Bricolage confronté à la concurrence de Weldom, Castorama ou Leroy Merlin, d’adopter notre enseigne discount Brico Cash, plus adaptée à son environnement. Nous avons déjà des candidats avec qui nous discutons depuis deux ans, car ce sont des projets qui prennent du temps et de plus, certains ont des contrats à respecter vis-à-vis de leur enseigne actuelle.
« Là où il n’y a pas la place pour créer un nouveau magasin, la franchise va nous permettre de proposer à des commerçants indépendants de nous rejoindre. »
Nous demanderons un droit d’entrée de 10 000 €, pour être sûrs d’avoir quelqu’un de sérieux en face, et une redevance de 3 % sur le chiffre d’affaires HT, comme cela se pratique sur notre marché. En contrepartie, nous apporterons à nos futurs franchisés la notoriété de nos enseignes, établie depuis de nombreuses années d’existence : ainsi, Bricorama fêtera l’an prochain ses 150 ans. Mais aussi une logistique puissante, ce qui est important pour la trésorerie de l’entreprise, des prix performants, avec un positionnement compétitif par rapport à nos concurrents, et des marques propres reconnues et puissantes. En ce qui concerne les opérations commerciales, nos futurs franchisés auront un peu plus de latitude qu’un adhérent : nous voulons qu’ils respectent notre modèle économique mais, s’ils veulent faire moins d’opération carte de fidélité par exemple, c’est leur choix, et nous allons le respecter.
Cette ouverture à la franchise remet-elle en cause votre modèle de commerce associé ?
Pas du tout : d’ailleurs, nous allons continuer les créations de magasins avec le commerce associé, au rythme de dix par an environ, ce qui fait de nous le numéro un en création de m² en France sur notre marché depuis cinq-six ans. Mais, là où il n’y a pas la place pour créer un nouveau magasin de bricolage, la franchise va nous permettre d’accueillir un chef d’entreprise bien installé sur sa ville, qui se dira que son avenir est plutôt avec Les Mousquetaires qu’avec son enseigne actuelle…
En termes d’organisation à la tête du réseau, nous avons mis en place une équipe de huit personnes pour piloter la franchise. En effet, alors que nos adhérents ont plusieurs points d’entrée au siège en fonction de leurs problématiques (informatique, prospectus…), nos futurs franchisés auront un seul relais. C’est pourquoi nous avons mis en place, dans chaque Direction, un référent franchise. Nous avons également prévu des animations séparées pour les adhérents et les franchisés, sauf pour la convention du mois de juin, car ils n’ont pas les mêmes attentes et les mêmes besoins. En revanche, la politique commerciale de chaque enseigne sera la même pour les franchisés et pour les adhérents, ce sont juste la durée du contrat et ses conditions qui seront différentes.
« La franchise peut être vue comme une antichambre pour devenir adhérent un jour. »
Certains pourraient penser qu’il va être compliqué de faire fonctionner deux mondes en parallèle : adhérents et franchisés. Je leur répondrais qu’il sera plus facile de de faire fonctionner des chefs d’entreprise indépendants, même s’ils n’ont pas tout à la fait les mêmes visions sur tout, que de faire coexister un modèle intégré à côté d’un modèle franchisé ! Car ce qui nous rassemble est toujours plus fort, c’est pourquoi il est plus facile d’être dirigé par d’autres chefs d’entreprise, qui exploitent eux aussi un ou plusieurs magasins, que par une entreprise cotée en Bourse, avec une vision à court terme. De plus, la franchise peut être vue comme une antichambre pour devenir adhérent un jour.
Quel bilan pouvez-vous dresser pour l’activité de vos enseignes Bricomarché, Bricorama et Brico Cash en 2023 ?
Notre activité a enregistré plus de 60 % de croissance depuis 2018, grâce notamment à la croissance externe (rachat de Bricorama, puis de Tridôme en 2023), mais pas seulement. Nous représentions quasiment 15 % de parts de marché, contre 10 % en 2018, ce qui fait de nous le N°1 des indépendants, et le N°3 du marché du bricolage, loin devant le N°4. Nous avons gagné des parts de marché en 2023, mais aussi sur les quatre premiers mois de 2024 : notre activité était en positif à fin avril, sur un marché en forte régression, grâce à nos acquisitions, mais aussi grâce à la proximité et à la réactivité de nos adhérents. Nous franchi des étapes importantes et beaucoup grossi en quelques années : aujourd’hui, nous avons digéré Bricorama et nous sommes en train de digérer Tridôme. Nous pouvons donc repartir de l’avant avec un nouveau projet, qui s’appelle la franchise.