La Cour de cassation vient de valider une importante décision de la cour d’appel de Dijon dans un litige franchiseur/franchisé. Selon les juges, l’enseigne concernée n’a pas respecté la loi Doubin. Les informations précontractuelles transmises manquant à leur avis « de sincérité et de loyauté ».
La décision Informatique Minute prise par la Cour de cassation le 4 octobre 2011 est instructive, pour tous les franchisés et franchiseurs. En rejetant le pourvoi formé par l'enseigne, les Hauts Magistrats rappellent toute l'importance que revêt la loi Doubin en matière de franchise. Et comment les juges peuvent l'utiliser.
Loi Doubin : les juges se montrent stricts
Cette loi Doubin que tout candidat à la franchise – et tout franchiseur – doit connaître, précise qu'avant la signature du contrat, un DIP, Document d'Information Précontractuelle doit être transmis par le franchiseur au futur franchisé. La liste des « informations sincères » qu'il doit contenir est précisée par décret.
Mais comme le montre cette affaire, les tribunaux ne se contentent pas de vérifier si les informations ont bien été remises, ils en évaluent la qualité. Et s'ils estiment qu'elle est insuffisante, ils en déduisent que « le consentement du franchisé a été vicié » et décident de la nullité du contrat. (Décision accompagnée ici du remboursement d'une somme de 30 000 euros au franchisé.)
Les informations précontractuelles doivent être exactes
Pour la cour d'appel de Dijon, dont l'arrêt du 8 juin 2010 a été validé, les informations fournies par le franchiseur Informatique Minute manquaient « de sincérité et de loyauté ». Sur trois points, qualifiés par elle d'éléments « essentiels » :
D'abord sur le développement du réseau. Dans le DIP remis le 19 décembre 2006 figuraient des chiffres datant de mars de la même année. Ces chiffres indiquaient 17 contrats signés, 12 autres en cours, un objectif de 22 franchisés à fin avril, 50 à fin décembre et un potentiel de 150 à terme.
Or, en novembre, le réseau n'en était toujours qu'à 17 contrats, selon un autre document du franchiseur…
La cour d'appel a considéré qu'il y avait là « dissimulations et déloyauté » : « si le franchisé avait été loyalement informé que les projections élaborées en mars pour la fin de l'année étaient loin d'être atteintes, il aurait nécessairement émis des doutes quant aux chances d'extension du réseau et au succès du concept. »
La bonne foi ne suffit pas
Par ailleurs, les magistrats ont estimé que les comptes annuels du franchiseur, annexés au DIP comme la loi le prévoit, n'étaient pas significatifs. Le CA réalisé dépendait à 63,3 % pour le premier exercice et à 43,5 % pour le second, d'un seul et même client. Lequel « entretenait des relations privilégiées » avec le franchiseur. Qui plus est, l'exercice clos au 30 septembre 2006 indiquait certes une dépendance réduite à 16 % à l'égard de ce client, mais aussi un résultat négatif de 91 590 euros, éléments non transmis au franchisé…
Enfin, les prévisions ont été jugées excessives. « Même si le bilan prévisionnel a été établi par (le franchisé), il l'a été sur la base de données fournies (par le franchiseur) », écrit la cour. Ces études « réalisées de manière approximative et sans prudence, ont également contribué à vicier le consentement de la société contractante sur les bénéfices attendus ». La « présentation avantageuse » de l'avenir ne reposait « sur aucun chiffre tiré de résultats réels de franchisés déjà en exercice ».
Il ne suffit donc pas au franchiseur de transmettre, même de bonne foi, les informations listées par la loi dans un DIP. Encore faut-il qu'elles soient exactes et ne puissent en rien induire le candidat en erreur. Et il en est de même pour les informations non obligatoires, comme celles qui fondent les prévisionnels…
Les tribunaux, décidément, se montrent rigoureux sur ces questions !