Selon la fédération Procos, le taux de vacance dans les centres commerciaux français a augmenté de 50 % en seulement deux ans. Le résultat d'une crise de surproduction des surfaces de vente et des stratégies risquées de certains opérateurs.
La fédération pour l’urbanisme et le développement du commerce spécialisé, qui s’était déjà inquiétée, ces derniers mois, de la montée de la vacance commerciale en centre-ville et dans les parcs d’activités de périphérie, s’alerte aujourd’hui de la multiplication des cellules vides dans les centres commerciaux français. Selon Procos, la vacance commerciale y est passée de 4,6 % en 2012 à 7,6 % aujourd’hui*. Soit une augmentation de 50 % en seulement deux ans.
Pour l’organisme, « plus que l’évolution de la moyenne, ce sont les évolutions des écarts à la moyenne, qui révèlent l’intensité du phénomène. Ainsi, 75 % des centres commerciaux bénéficiaient d’une situation très favorable en 2001, avec un taux de vacance inférieur à 5 %. Ils ne sont plus que 60 % dans ce cas en 2014. A l’autre extrémité, 14 % des centres commerciaux présentaient un taux de vacance supérieur à 10 % en 2001. Ils sont désormais 18 % ».
Procos note que les centres les plus anciens, ouverts dans les années 70, sont ceux qui résistent le mieux (avec une vacance oscillant autour de 5 %). A l’inverse, la dernière génération de malls, inaugurés après 2000, « peine à trouver sa place dans un marché arrivé à maturité », et affiche autour de 10 % de vacance.
Des écarts apparaissent aussi selon la taille des centres commerciaux, souligne la fédération. Les petites (20 à 40 boutiques) et grandes galeries marchandes (40 à 80) ont connu les plus fortes dégradations pour atteindre respectivement aujourd’hui 7,4 % et 7 ,5 % de vacance. Les centres régionaux (80 à 120 boutiques), avec 6,9 % de cellules vides, et les méga malls (plus de 120 boutiques), à 6,1 %, s’en sortent un peu mieux.
Certains types de centres seraient par ailleurs particulièrement touchés, dont notamment les petites galeries marchandes de centre-ville « débordées par la concurrence » (Galerie du Palais à Tours, Les Halles du Beffroi à Amiens…), et les très grands centres commerciaux « dont la zone primaire se caractérise par un faible niveau de revenu », comme Le Millénaire à Aubervilliers, Cité de l’Europe à Calais ou Grand Littoral à Marseille, remarque Procos.
Surproduction et stratégies risquées
Enfin, le profil et la stratégie des bailleurs ont également un impact sur le taux d’occupation de leurs centres. « Les opérateurs ayant développé les opérations les plus singulières en termes de programmation (absence de locomotive alimentaire, forte composante culture-loisirs et restauration) et de localisation (en général sur d’anciennes friches industrielles ou portuaires situées aux abords d’un centre-ville historique), mais aussi les plus risquées, disposent aujourd’hui d’un patrimoine frappé par les taux de vacance les plus élevés (supérieur à 10 %) ». A l’opposé, les opérateurs privilégiant « la régularité et la pérennité de leurs flux de revenu locatif à long terme plutôt que la maximisation du rendement de leurs actifs à court terme, connaissent aujourd’hui les taux de vacance les plus faibles, inférieurs à 5 % », note Procos.
Des chiffres et un point de vue qui n’ont pas manqué de faire réagir. Le Conseil national des centres commerciaux (CNCC) est, le premier, monté au créneau pour dénoncer une étude qui ne « reflète en rien la réalité des taux de vacance des centres commerciaux visés »… toutefois sans donner ses propres chiffres (il n’en publie plus, ni sur la fréquentation ni sur les CA des centres qu’il représente depuis 2011). La foncière Apsys a tenu à préciser de son côté que selon le mode de calcul de l’Epra (European Public Real Estate Association)** « qui fait référence dans la profession », le taux de vacance dans ses centres commerciaux (Ruban Bleu à Saint-Nazaire, L’Heure Tranquille à Tours, Les Rives de l’Orne à Caen, Beaugrenelle à Paris et Parc Saint Paul à Saint-Paul-lès-Romans) s’établit à 2,7 % et non à 11,2 % comme évoqué par Procos. Un standard sur lequel s’appuie également le Groupe Unibail-Rodamco pour affirmer qu’elle n’est que de 2,5 % (et pas 6,5 %) dans ses galeries (Les Quatre Temps, Aéroville, So Ouest, Confluence, Nice Etoile…)
*Vacance commerciale : pourcentage d’emplacements vides par rapport au nombre total d’emplacements
**Vacance financière : rapport loyers attendus sur loyers perçus