La cour d’appel de Metz valide le droit de préférence inclus dans un contrat de franchise Carrefour. Alors que la Cour de cassation a pris auparavant une position opposée dans un litige comparable.
La cour d'appel de Metz a validé, le 27 janvier 2015, un droit de préférence dans un contrat de franchise Carrefour.
La clause prévoyait que le franchisé devait, avant de vendre son fonds de commerce, avertir son franchiseur. Et lui laisser trois mois pour se porter éventuellement acquéreur aux prix et conditions obtenues par ailleurs.
On se souvient que la Cour de cassation a, le 4 novembre 2014, cassé un arrêt semblable de la cour d'appel de Paris.
La plus haute juridiction française a demandé aux magistrats parisiens de rejuger l'affaire, en examinant si ce droit de préférence n'avait pas pour effet « en limitant la possibilité de rachat de magasins indépendants par des groupes de distribution concurrents, de restreindre artificiellement le jeu de la concurrence sur le marché du détail de la distribution à dominante alimentaire ».
Dans l'affaire jugée le 27 janvier, la cour d'appel de Metz répond par avance « non ». Pour deux raisons :
- Le seul obstacle à la vente de l'entreprise franchisée à un groupe concurrent est, en l'occurrence, la décision du franchiseur de faire une offre à prix et conditions égales,
- Le franchisé n'est « pas placé dans une situation captive » dans la mesure où il a « toute latitude pour procéder à une cession totale ou partielle » de son fonds de commerce.
Pour la cour, le droit de préférence considéré, qu'elle qualifie toutefois de droit de préemption*, « n'est entaché d'aucune illicéité ».
La cour se prononce aussi sur l'Avis de l'ADC (Autorité de la Concurrence) du 7 décembre 2010, invoqué par le franchisé pour tenter de démontrer le caractère irrégulier de ce droit de préférence.
L'ADC préconise en effet « l'interdiction » de ce type de droits (de préférence, de préemption, bref de priorité pour les franchiseurs) dans la distribution alimentaire.
La cour relève que les avis de l'ADC « s'analysent comme des recommandations adressées au législateur » et « n'ont en aucun cas le caractère contraignant d'une décision ».
Pour elle, l'Avis de l'ADC sur la distribution alimentaire « n'a pas la valeur juridique » que lui confère le franchisé et, en tout cas, « ne lie pas » la cour d'appel de Metz.
Il sera intéressant de suivre ce que deviendra cette décision sur le droit de préférence si la Cour de cassation en est saisie.
*Droit de préférence ou de préemption ? La cour d'appel de Metz rappelle que, « le droit de préférence est un droit qui donne au réseau d'origine (…) le privilège de la première offre d'achat et, en cas de désaccord entre les parties sur les conditions de vente, ces dernières sont fixées à dire d'expert ». Le droit de préemption est celui qui permet au franchiseur de se porter acquéreur à la place d'un autre repreneur, si la cession (que le franchisé peut refuser) s'effectue aux mêmes conditions.
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