L’arrêt de la Cour de cassation sur les clauses de non-concurrence et de non-affiliation post-contractuelles inspire à l’auteur ce commentaire. Pour lui, il est clair que ces clauses sont nécessaires à la défense des intérêts légitimes des franchisés restant dans le réseau.
Les échanges récents entre avocats éminents concernant les clauses de non-concurrence et de non-affiliation post-contractuelles ne doivent pas laisser indifférents les non-spécialistes du droit dont je fais partie.
L’enjeu est de taille : rien de moins que la jouissance gratuite par un ancien franchisé du savoir-faire que lui a transmis son ancien franchiseur ou pire, l’évasion du savoir-faire, toujours aussi gratuite, dans un réseau concurrent.
Non-concurrence et non-affiliation : des différences précisées
-la clause de non-concurrence « a pour objet de limiter l’exercice par le franchisé d’une activité similaire ou analogue à celle du réseau qu’il quitte »
-la clause de non-affiliation « se borne à restreindre sa liberté d’affiliation à un autre réseau ».
Les deux clauses ont pour conséquence une restriction de la liberté d’exploitation post-contractuelle. Leurs effets sont différents :
–la non-concurrence interdit l’exploitation à titre individuel de l’activité mais aussi au sein d’un réseau concurrent, existant ou en création
–la non-affiliation empêche de rejoindre un réseau concurrent, mais permet l’exploitation à titre individuel du métier appris grâce au franchiseur.
Ces clauses sont parfaitement admises par la Haute Cour, sous réserve :
-« du caractère proportionné de l’interdiction faite au franchisé au regard des intérêts du franchiseur » : arrêt du 10-01-2008
-que la clause soit « proportionnée aux intérêts légitimes du franchiseur au regard de l’objet du contrat » : arrêt du 24-11-2009
Et sous réserve d’être limitée aux locaux du franchisé et à un an : règlement d’exemption du 20 avril 2010.
Notons que la limitation de l’obligation de non-concurrence à un an est adaptée à la franchise. Le franchiseur a pour obligation de faire évoluer le savoir-faire. S’il le fait par un processus d’amélioration permanente on peut concevoir qu’après un an, l’ancien franchisé ne disposera plus que d’un savoir-faire partiellement obsolète et que la mise en œuvre de ce savoir-faire partiel et dépassé ne nuira plus au réseau d’origine
Des clauses protectrices pour les franchisés restants
–sans la clause de non-concurrence, l’ancien franchisé bénéficiera gratuitement du savoir-faire reçu du franchiseur et utilisera ce savoir-faire contre les franchisés du réseau, qui, eux, paient pour mettre en œuvre le savoir-faire alors qu’ils seraient sans doute fondés à ne plus payer pour ne pas être lésés par rapport au franchisé qui a quitté le réseau ! Paradoxal.
–sans la clause de non-affiliation c’est le réseau concurrent et l’ensemble de ses franchisés qui bénéficiera tout aussi gratuitement du savoir-faire pour lequel le franchisé paie ! Insupportable.
Il y a là sans doute une autre voie à explorer : au lieu d’opposer franchisé sortant et franchiseur, il faudrait remettre le franchiseur dans son rôle, celui de défenseur des intérêts des membres de son réseau.
Les rédacteurs des contrats et les avocats qui plaident auraient tout intérêt à déplacer le débat devant les tribunaux : ce ne sont plus les « intérêts légitimes du franchiseur » qui sont à défendre, mais les intérêts légitimes des franchisés du réseau.
Probablement plus facile à démontrer et à faire admettre ! Surtout si, dans la rédaction de la clause pénale il est prévu que les indemnités, déduction faites des coûts, reviennent au réseau, sous la forme, par exemple, d’un versement au budget de communication du réseau.
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