Commentant une récente décision de justice, les auteurs, avocats, mettent en évidence les divers éléments qui permettent de caractériser l’existence d’un contrat de franchise, susceptibles d’entrainer la requalification d’un contrat de distribution.
La mise à disposition, dans un contrat de distribution, d’un « savoir-faire », qualifié comme tel dans le contrat, la fourniture d’une formation nécessaire à la mise en œuvre de ce savoir-faire, et la référence dans les documents précontractuels à la notion de « franchise » sont susceptibles d’entrainer la requalification du contrat en contrat de franchise.
Un distributeur ayant conclu un contrat de distribution avec un fournisseur agit en résolution du contrat qualifié par les parties de « contrat de partenariat commercial« pour manquement du fournisseur à ses obligations contractuelles.
Amené par les parties à se prononcer sur la qualification du contrat en cause, le Tribunal de Commerce de Tours a jugé que le contrat en cause était un contrat de franchise, et prononçait la résolution de celui-ci aux torts exclusifs du franchiseur.
Bien que la qualification du contrat n’était pas déterminante de l’issue du litige, puisque le demandeur fondait son action sur des obligations stipulée au contrat de partenariat, la Cour s’est également prononcée sur la qualification du contrat.
Savoir-faire, assistance, signes distinctifs : les trois éléments essentiels du contrat de franchise
La Cour a tout d’abord retenu l’engagement du fournisseur de mettre à disposition un savoir-faire spécifique qualifié successivement dans le contrat de « concept révolutionnaire « , de « formule confidentielle », de « méthode inédite » ou encore de « savoir-faire unique », consistant dans une formule de nettoyage itinérant sans eau et avec des produits biologiques.
La Cour a ensuite retenu l’existence d’une formation obligatoire préalable d’une durée de 40 heures, qualifié dans le contrat de « processus complet de formation et de suivi », caractérisant l’assistance dont bénéficiait le distributeur.
La Cour a également relevé la mise à disposition de signes distinctifs au profit du distributeur, notamment par l’obligation d’installer une enseigne portant la marque des produits distribués, de respecter un aménagement spécifique défini, en utilisant les signes et présentoirs portant la marque, et plus généralement de respecter « l’image commune des points de vente« .
En outre, la Cour a observé, sur un plan sémantique, que le fournisseur faisait lui-même référence à la notion de « franchise » dans les différents documents précontractuels, et ce à plusieurs reprises.
Bien définir les obligations afin d’éviter tout risque de requalification
La Cour caractérisait ainsi les trois éléments essentiels du contrat de franchise, à savoir la mise à disposition d’un savoir-faire, la délivrance d’une assistance pour la mise en œuvre de ce savoir-faire, et la mise à disposition de signes distinctifs.
Elle jugeait à ce titre que le contrat de partenariat commercial « organise bien la distribution (…), au travers d’un réseau, de produits et de services (…) dans un cadre supposant la mise en œuvre d’un savoir-faire spécifique, une collaboration étroite entre les cocontractants et le respect de signes de ralliement de la clientèle ».
La Cour a ensuite relevé divers autres éléments, sans indiquer s’ils ont déterminé sa décision de requalification du contrat. La Cour a ainsi observé qu’un document d’information précontractuel avait été délivré, que le contrat avait été conclu intuitu personae, et qu’il comportait un droit d’entrée et des redevances, une obligation d’approvisionnement exclusif.
Ces éléments, n’étant pas propre à un contrat de franchise, ne sauraient permettre à eux seuls de caractériser l’existence d’un contrat de franchise.
Cette décision rappelle qu’il convient, afin d’éviter tout risque de requalification d’un contrat, de bien définir les obligations à la charge des parties au regard de l’objet du contrat, et d’adopter le vocabulaire propre à chaque type de contrat, tant dans le contrat que dans les documents précontractuels.
(Référence : CA Orléans, 16 avril 2015, n°14/01807)