La cour d’appel de Montpellier valide le prévisionnel transmis par un franchiseur. Comportant des données « fiables et significatives » sur une soixantaine de magasins du réseau, il prenait en référence 6 points de vente « comparables » au projet du franchisé.
Le 28 février dernier, la cour d’appel de Montpellier a pris, en matière de prévisionnels en franchise, une décision intéressante.
Un couple de franchisés se lance fin 2012. Mais au lieu d’un chiffre d’affaires mensuel prévu de 192 000 €, les franchisés ne réalisent que 111 000 € en moyenne lors des 7 premiers mois. Largement en dessous du seuil de rentabilité (estimé à 172 000 €). Résultat, leur société est placée en redressement puis, fin 2013, en liquidation judiciaire.
Entre-temps, le franchiseur, qui a suspendu ses livraisons, les a assignés en justice, leur réclamant quelque 270 000 € de marchandises impayées. Pour leur défense, les franchisés l’accusent de leur avoir, entre autres, fourni un prévisionnel trompeur.
Tel n’est pas l’avis de la cour d’appel de Montpellier.
Les magistrats relèvent que « le document prévisionnel (…) comportait un tableau récapitulatif de 61 magasins franchisés en France », indiquant pour chacun d’eux :
-le nombre d’habitants dans leur zone de chalandise,
-la qualité de leur emplacement et la situation concurrentielle,
-la surface de vente des magasins,
-le chiffre d’affaires réalisé en 2010 et le rendement CA/m².
« Au sein de ce tableau, ajoute la cour, étaient surlignés 6 magasins que (le franchiseur) considérait comme comparables avec le futur (établissement des franchisés). » Et dont il a pris la moyenne de CA/m² comme référence pour leur projet.
Une évaluation « sérieuse et raisonnable »
En outre, celui des 6 points de vente qui a plus particulièrement servi de base pour établir le prévisionnel « venait d’ouvrir en mai 2011 sur une surface similaire pour 100 000 habitants à 20 minutes de trajet avec une concurrence exploitant environ 5000 m² de surface commerciale ». Ce qui correspondait aux données de la zone envisagée.
« Il est de principe, rappelle la cour, que lorsque le franchiseur remet au candidat franchisé des documents (…) non exigés (par la loi Doubin), il doit veiller à fournir une information sérieuse, loyale et sincère concernant les éléments de nature à avoir un impact significatif sur le chiffre d’affaires réalisé».
En l’occurrence, les informations figurant dans le tableau récapitulatif du franchiseur n’apparaissent pas erronées aux juges, mais « au contraire fiables et significatives ». Le prévisionnel n’était donc « pas exagérément optimiste ni trompeur ».
« Seule une étude plus approfondie des conditions locales de concurrence (…) aurait permis d’affiner cette prévision » jugée « sérieuse et raisonnable ». Et ce n’était, selon la cour, pas au franchiseur de la réaliser, mais aux franchisés.
Les franchisés se voient donc déboutés de leurs demandes de remboursement et de dommages et intérêts. Et la créance du franchiseur est inscrite au passif de leur société.
-Lire aussi à ce sujet l’article du cabinet Linkea (Olivier Deschamps et Cécile Peskine)