Peut-on modifier un projet en cours d’instruction devant la commission d’aménagement commercial, ou postérieurement à l’obtention de l’autorisation ? Oui, répond l’auteur, avocat, mais à certaines conditions.
Par Stéphanie Encinas, Avocat associé, Létang Avocats
Peut-on modifier un projet en cours d’instruction devant la commission d’aménagement commercial, ou postérieurement à l’obtention de l’autorisation ?
Oui, mais à certaines conditions
Entre le moment où un projet de nouveau commerce est autorisé et l’entrée du premier client dans la surface de vente il est fréquent que plusieurs années s’écoulent. Dans ce délai, le concept commercial peut avoir évolué suivant les modes de consommation de la clientèle attendue. La surface de vente obtenue n’est plus tout à fait adaptée, le parking est devenu trop étroit, les vitrines sont à améliorer… Parfois, c’est durant l’instruction du projet que des modifications apparaissant nécessaires. Mais alors, l’autorisation d’exploitation obtenue correspond-elle encore au projet ? Ne faut-il pas tout recommencer ?
La fusion du permis de construire avec l’autorisation d’exploitation commerciale
Depuis la loi du 18 juin 2014, dite Loi Pinel, l’autorisation d’exploitation commerciale a fusionné avec le permis de construire, ce dernier valant alors autorisation d’exploitation commerciale. Désormais, le dossier de demande de permis de construire doit comprendre le dossier d’autorisation d’exploitation commerciale, l’ensemble étant déposé auprès du maire, guichet unique. C’est au maire qu’il appartient de transmettre le dossier à la Commission départementale d’aménagement commercial (CDAC) située en préfecture.
Ce dossier unique signifie que la demande de permis de construire doit être strictement identique au projet soumis à autorisations auprès de la CDAC.
La nécessité de modifier le projet en cours d’instruction devant la CDAC ou la CNAC
Dans le cadre de l’instruction du projet devant la CDAC, le pétitionnaire peut être contraint de modifier son projet si le service instructeur (la DDT) soulève une difficulté (un accès routier inadapté, l’absence de panneaux photovoltaïques …). Si le dossier fait l’objet d’un recours devant la commission nationale d’aménagement commercial (CNAC), il pourra être opportun dans certains cas d’apporter des modifications au projet afin de le rendre plus compatible avec les objectifs et les critères édictés par le législateur à l’article L752-6 du code de commerce et décrocher ainsi l’autorisation convoitée.
La question se pose donc de savoir si le projet peut être librement modifié en cours d’instruction ou si un nouveau dossier doit être déposé auprès de l’administration.
Qu’entend-on par modification substantielle ?
L’article L752-15 du code de commerce soumet à l’obtention d’une nouvelle autorisation les modifications intervenant en cours d’instruction d’un projet qui auraient pour effet de le modifier substantiellement au regard de critères prévus à l’article L752-6 du code de commerce.
Pour l’Administration, une modification est substantielle lorsqu’elle touche l’économie générale du projet et pourrait avoir une incidence sur la décision de la CDAC et/ou de la CNAC (Circulaire du 16 janvier 1997). L’article L752-15 du code de commerce est quant à lui plus précis puisque ces modifications doivent avoir un lien avec les critères d’autorisations (aménagement du territoire, développement durable, protection des consommateurs).
En d’autres termes, si le projet modifié est à nouveau présenté à la commission d’aménagement commercial, serait-il autorisé dans les mêmes conditions ? L’analyse des avis rendus par les commissions d’aménagement commercial constitue un indice important des caractéristiques du projet qui ont été considérées comme déterminantes pour obtenir l’autorisation (par exemple : la présence de toitures photovoltaïques, ou un concept novateur développé par le projet)
Le projet évolue après l’obtention de l’autorisation d’exploitation commerciale
Une fois autorisé, le pétitionnaire ne détient qu’une seule autorisation : le permis de construire valant autorisation d’exploitation commerciale.
Pour autant, si une modification du projet peut avoir une incidence sur l’autorisation d’exploitation commerciale, elle n’aura pas nécessairement d’impact sur l’autorisation de construire elle-même. Si la modification envisagée n’a pas d’incidence sur les règles d’urbanisme (par exemple : modification de la répartition des surfaces de vente de la galerie marchande), le porteur du projet pourra déposer une demande de permis de construire modificatif mais qui aura pour seul objet le dépôt d’une nouvelle autorisation d’exploitation commerciale.
En résumé, il est envisageable de modifier un projet non encore ouvert au public mais seulement si ces modifications ne sont pas de nature à altérer l’appréciation qui a été faite du projet au regard des critères d’octroi de l’autorisation d’exploitation commerciale.