Dans un conflit entre un franchisé de l’alimentaire et son franchiseur, un arrêt de la Cour d’Appel de Paris ouvre, selon l’auteur, « une large porte aux pouvoirs de l’Autorité de la Concurrence ».
Un arrêt rendu par la Cour d’Appel de Paris le 28 septembre 2011 ouvre une large porte aux pouvoirs de l’Autorité de la Concurrence.
Un franchisé de la distribution alimentaire résilie son contrat avec effet immédiat, en prétendant que le franchiseur a manqué à ses obligations contractuelles. Il poursuit aussitôt son activité sous une enseigne concurrente, en commercialisant des produits à marques propres attachés à cette enseigne.
La résiliation fait l’objet d’une contestation et d’une procédure initiée par le franchiseur. Mais ce qui nous intéresse ici concerne une deuxième procédure arbitrale engagée par le chef de réseau aux fins d’obtenir la condamnation du franchisé et de la nouvelle enseigne, pour complicité, du fait de la violation de la clause de non affiliation post-contractuelle prévue par l’engagement de franchise.
Le franchiseur soutient que le franchisé a non seulement immédiatement arboré la nouvelle enseigne, mais aussi qu’il a été approvisionné de façon constante par des produits de cette enseigne. Selon lui, il ne serait pas imaginable que le passage instantané d’une enseigne à l’autre « ait pu avoir lieu sans un soutien financier et une assistance logistique et technique préalable importante de la part du seul tiers susceptible de la lui apporter, à savoir le titulaire de l’enseigne et le grossiste des produits » … « qui a donc été nécessairement tierce complice des agissements fautifs » du franchisé.
La validité de la clause de non-affiliation en question
De son côté, le franchisé affirme que les dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce auraient été violées, qu’ainsi l’attitude du franchiseur conduirait à interdire tout départ du franchisé vers d’autres réseaux de distribution et à empêcher tout concurrent d’approvisionner l’ex-franchisé et de lui concéder une quelconque enseigne.
Mouche, la Cour suit le raisonnement. Elle juge, s’agissant de la validité de la clause de non affiliation considérée au sens des articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de commerce, qu’il convient « de consulter l’autorité de la Concurrence à l’effet de donner un avis sur le caractère de pratiques anticoncurrentielles au regard des articles L. 420-1 et L. 420-2 susvisés ».
Une clause déjà validée à maintes reprises
L’argument tendant à faire valoir une forme d’interdiction systématique de quitter le réseau ou à empêcher un concurrent d’approvisionner l’ex-franchisé avait pourtant été jusque là maintes fois développé et tranché par la jurisprudence. Cette fois, la Cour botte en touche. Elle sursoit à statuer sur ce plan en invitant l’Autorité de la Concurrence à donner son avis sur la validité de la clause suivante au regard du droit de la concurrence :
« Le franchisé s’oblige à ne pas utiliser directement ou indirectement, personnellement ou par personne interposée, en société ou autrement, durant une période de un an à compter de la date de résiliation du présent contrat, une enseigne de renommée nationale ou régionale, déposée ou non, et à ne pas offrir en vente des marchandises dont les marques sont liées à ces enseignes (marques propres), ceci dans un rayon de 5 km du magasin SHOPI faisant l’objet du présent accord « .
La clause a déjà été validée à maintes reprises par des juridictions. Nous serons particulièrement attentifs à l’arrêt qui interviendra suite à l’avis de l’Autorité de la Concurrence, car il semble qu’en acceptant de transmettre le dossier pour avis, la Cour fait un pas vers une fragilisation de la clause de non affiliation, au moins pour les surfaces alimentaires.