L’article 29 bis A de la loi El Khomri « repose sur un contresens parce qu’elle assimile les franchisés à des filiales du franchiseur, alors qu’ils doivent rester des entrepreneurs indépendants », estime l’auteur, avocat. Pour lui, « cette loi n’est pas bonne pour les franchisés ni pour la franchise », sauf l’instance de dialogue et la reconnaissance juridique du réseau, « qui sont une bonne chose ».
L’article 29 bis A de la loi El Khomri prévoit que dans tous les réseaux de franchise de plus de 50 salariés « le franchiseur a la charge de la mise en place d’une instance de dialogue » composée de 5 à 9 représentants des salariés élus, d’un représentant des franchisés et du franchiseur qui présidera cette instance, pour un mandat de 4 ans à hauteur de 20 h par mois.
Cette instance devra être informée trimestriellement de l’activité et de la situation économique et financière du réseau, de l’évolution et des prévisions d’emploi annuelles ou pluriannuelles ainsi que des actions éventuelles de prévention envisagées compte tenu de ces prévisions, de la politique sociale et des conditions de travail de l’ensemble du réseau, des entreprises entrant et sortant du réseau. Elle pourra mettre en place des activités culturelles et sociales financées par les franchisés.
Les franchisés devront informer l’instance de dialogue des emplois disponibles chez eux et lorsque le franchiseur ou un franchisé voudra licencier, il aura une obligation de reclassement dans le cadre du réseau. Les syndicats représentatifs pourront désigner un délégué syndical pour le représenter auprès des franchisés. Des accords de réseau pourront être signés et s’appliquer si 50 % des salariés et des franchisés le signent.
Bigre !
« Les informations communiquées concernent les membres réseau, or les salariés n’en sont pas membres »
D’abord rien ne justifie l’avantage numérique donné aux salariés (5 à 9 contre 1 franchisé). Ensuite, les informations communiquées concernent les membres réseau, or les salariés n’en sont pas membres. Ils auront accès à des informations qui peuvent être sensibles et toucher au savoir-faire et au secret des affaires, ce qui ne sera pas sans risque concurrentiel.
Derrière les informations données aux salariés, il y aura le contrôle de ces informations et leur immixtion dans la gestion sociale des franchisées, qui y perdront leur liberté de gérer l’emploi dans leurs entreprises au profit d’une politique sociale collective.
Informer les salariés des décisions concernant l’organisation, la gestion et la marche générale du réseau de franchise, c’est les placer au même niveau que les franchisés alors qu’ils n’ont ni les mêmes obligations, ni les mêmes engagements financiers personnels, ni les mêmes responsabilités entrepreneuriales, ni les mêmes droits, ni les mêmes protections.
S’il est normal que les franchisés sachent où va le réseau et comment il y va, parce que leurs entreprises sont liées juridiquement et économiquement au franchiseur, il n’est pas de même pour les salariés qui ne dépendent que du franchisé, leur employeur.
« Cette loi est la conséquence des excès des franchiseurs »
Cette loi est la conséquence des excès des franchiseurs, qui n’ont cessé de renforcer la dépendance juridique et économique des franchisés. Ce faisant ils ont fait croire à certain élus, peu au fait de la franchise, qu’un franchisé ne serait qu’une succursale.
Rappelons que dans un réseau de franchise, si le franchiseur et chaque franchisé sont interdépendants économiquement et concourent ensemble au développement de leurs entreprises respectives, ils doivent rester juridiquement indépendants et libres se séparer à l’issue du contrat.
Cette loi n’est pas bonne pour les franchisés ni pour la franchise.
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