La franchise porte en elle toutes les tensions naturelles des acteurs du commerce indépendant, estime l’auteur, avocat, et ces tensions risquent de dégénérer en conflit économique du fait de la conjoncture. Mais le modèle de la franchise permettrait aussi d' »amortir » ces tensions, explique-t-il.
La franchise porte en elle toutes les tensions naturelles des acteurs du commerce indépendant. Soutenir le contraire aboutit à passer sous silence de manière totalement injustifiée une dimension fondamentale de la relation contractuelle franchiseur-franchisé. Toutefois, la spécificité de cette relation ne saurait être limitée à ce simple rapport de force, mais s’arqueboute également sur une profonde interdépendance des partenaires facteur d’unité.
En pratique, l’univers de la franchise se présente généralement comme le lieu où se retrouve l’antagonisme naturel de l’acheteur et du vendeur. Cet antagonisme latent trouve sa source dans le rapport de force existant entre les « partenaires » pour l’appropriation des fruits de leur commerce. Avec cette nuance qu’en franchise, le résultat économique qui sous-tend l’ensemble du système est réalisé par le franchisé ou plus exactement par l’ensemble des franchisés membres du réseau.
Ainsi perçue, la franchise se présente comme un système relationnel spécifique dans lequel on retrouve, d’un côté un franchiseur qui cherche à percevoir des droits d’entrée, des redevances, des droits de formation, des droits de renouvellement de contrat,… et même à réaliser des marges (plus ou moins significatives) sur des produits et/ou services revendus à son co-contractant et de l’autre, un franchisé, qui cherche à faire croître sa marge, à diminuer ses frais… en un mot à obtenir plus d’autonomie tant économique que fonctionnelle.
Ces tensions légitimes et incontournables conduisent inéluctablement à des frictions et parfois à des heurts qui peuvent rendre les rapports interindividuels délicats et houleux.
La conjoncture économique aggrave les tensions
Ces difficultés se rencontrent plus particulièrement lorsque le chiffre d’affaires à partager entre les membres du réseau est quelque peu obéré par la conjoncture économique, les contraintes du marché ou par le manque d’efficience du concept… ou encore lorsque la marge de manœuvre qui est dévolue au franchisé dans l’exercice de son activité professionnelle n’est pas pertinente…
Dans ces conditions, et surtout lorsque l’argent, qui est le nerf de la guerre, fait défaut dans le réseau, les lignes de force entre ses membres risquent d’être perturbées, de sorte que les tensions induites par le système peuvent dégénérer en oppositions ouvertes voire en conflits économiques et juridiques.
Cependant, et par-delà ces clivages incontournables du monde du commerce, la franchise porte en elle de profondes dimensions unionistes et intégrationnistes qui permettent d’absorber autant que possible l’onde de choc de simples rapports de force égoïstes et opportunistes des « marchands du temple », pour intégrer une logique d’interdépendance, génératrice de bénéfices communs.
La franchise : un « amortisseur » de tensions ?
Ainsi, être membre d’un réseau permet à chaque partenaire de dépasser le clivage de sa stricte indépendance juridique particulière, pour intégrer un espace relationnel collectif plus soutenu où chaque « associé de fait » est dépendant, pour sa propre réussite, de la réussite de son partenaire direct et, d’une manière plus générale, de celle des autres acteurs du réseau.
La franchise apparait dès lors comme un modèle relationnel particulièrement performant où les tensions interindividuelles sont en quelque sorte « amorties » par la perspective commune d’une réussite partagée. Cette perception collective des rapports franchiseur – franchisé devrait permettre aux partenaires d’appréhender leurs échanges professionnels de manière plus apaisée. En effet, ceux-ci, étant contractuellement et organisationnellement liés dans une aventure conjointe, devraient être enclins à appréhender leur vis-à-vis comme un élément d’un ensemble qu’on ne peut décemment « malmener » sous peine de porter atteinte à terme au réseau lui-même.
Cette prise de conscience indispensable au bon fonctionnement du système contribue à faire de l’univers de la franchise un espace relationnel spécifique, où franchiseur et franchisé ne sont pas seulement des hommes au service de leur affaire mais aussi, et surtout, des membres actifs au service de l’affaire de tous les acteurs du réseau.