Une franchisée ayant échoué dans son projet réclame la nullité de son contrat ou à défaut sa résiliation aux torts de son ex-franchiseur. Elle invoque une tromperie sur la rentabilité et un défaut d’assistance. La cour d’appel de Paris la déboute.
Le 20 janvier 2021, la cour d’appel de Paris a refusé à une franchisée la nullité du contrat qu’elle réclamait pour tromperie sur la rentabilité.
Dans ce litige, le contrat est signé en 2010 et l’établissement ouvert en 2011. Mais au lieu des 142 000 € de chiffre d’affaires attendus la première année, c’est seulement 75 000 qui sont réalisés. Quant au bénéfice de 11 200 € prévu, il n’est pas au rendez-vous. Et en juin 2013, après 26 mois d’exploitation au lieu de 5 ans, la société franchisée est placée en liquidation judiciaire.
Selon la franchisée, la réalité de la concurrence a été minimisée par le franchiseur
La franchisée estime avoir été trompée par son franchiseur. Elle lui reproche de ne pas lui avoir transmis de données sérieuses sur l’état général et local du marché et ses perspectives de développement, d’avoir minimisé la réalité de la concurrence dont toute une partie n’était selon elle pas prise en compte, d’avoir transmis des comptes d’autres membres du réseau « ne reflétant pas la réalité de leurs deux premières années ».
Estimant n’avoir commis elle-même « aucune faute de gestion », elle considère que son consentement a été vicié et renforce son argumentaire en soulignant qu’aucun autre établissement à l’enseigne n’a pu s’implanter depuis dans la ville.
Étude de marché et prévisionnel : pour la cour, la franchisée n’a pas été trompée
Les magistrats de Paris n’ont pas la même lecture des faits. Au vu des pièces transmises par le franchiseur, ils considèrent que des informations réelles ont été données sur le marché général et local avec des éléments mettant selon eux en évidence un potentiel de développement.
Ils notent que la franchisée a mené elle-même « une étude de marché approfondie ». Pour eux, « lorsqu’elle a signé le contrat de franchise, (elle) avait parfaitement connaissance de la concurrence » que pouvaient représenter les différents acteurs « et se trouvait en mesure d’en apprécier les conséquences ».
Par ailleurs, « si les prévisionnels repris dans le DIP se sont révélés bien trop optimistes, le franchiseur avait précisé qu’ils avaient été construits sur la base des chiffres observés dans son réseau et qu’ils devaient être personnalisés ».
Enfin, la franchisée a « elle-même établi son propre prévisionnel » basé sur les comptes des performances de cinq entreprises en optant pour la prévision la plus basse avec un point mort à 12/18 mois.
Pour les juges, elle est donc « mal fondée » à soutenir avoir été trompée sur la rentabilité. La nullité du contrat est refusée.
Selon la franchisée, son partenaire a manqué à ses devoirs d’assistance et de conseil
La franchisée accuse aussi le franchiseur de nombreux manquements contractuels pour lesquels elle réclame, à défaut d’annulation, la résiliation de son contrat aux torts de son ex-partenaire.
Selon elle, « aucun savoir-faire substantiel procurant un avantage concurrentiel au franchisé » n’a été transmis, le concept n’est « pas réitérable sur la ville », la formation permanente de quatre jours par an au siège et les visites promises n’ont pas toutes été effectuées, le savoir-faire en communication était inexistant, la politique tarifaire trop élevée, etc.
La franchisée estime aussi que, malgré ses nombreuses alertes et appels à l’aide, le franchiseur ne lui a pas proposé de solution réelle à ses difficultés, sauf un audit quand il a été trop tard et une baisse de redevances qui en elle-même ne pouvait rien régler. Il a donc manqué à son devoir de conseil.
Savoir-faire et assistance : pas de manquements de nature à résilier le contrat selon les juges
La cour écarte une à une ces accusations. Pour elle, « le contenu du manuel opérationnel précis et détaillé versé aux débats ainsi que la formation initiale établissent la réalité du savoir-faire et de sa transmission ». Par ailleurs, « le franchiseur justifie de la rentabilité du concept en produisant le résultat » de ses établissements.
Si en effet la formation permanente n’a pas été délivrée au siège et si les visites prévues n’ont pas toutes eu lieu, notent les magistrats, les échanges de courriels attestent à leurs yeux de l’assistance réelle et permanente du franchiseur aux côtés de sa franchisée.
Quant au devoir de conseil, à la lumière d’un compte-rendu de visite de juillet 2012, les juges considèrent que le franchiseur a formulé de réelles préconisations visant à aider sa franchisée à améliorer sa performance (postes de dépenses pouvant être optimisés, mise en œuvre d’une nouvelle grille tarifaire, aide financière mensuelle).
Pour la cour, les manquements contractuels invoqués par la franchisée ne sont donc pas démontrés ou insuffisants pour justifier la résiliation du contrat.
La franchisée est condamnée à régler 528 € de redevances impayées.