La Cour de cassation vient de sonner la fin des conflits qui opposent depuis des années certains médecins aux instituts d’esthétique, notamment aux chaînes de franchise, en matière d’épilation à la lumière pulsée.
La plus haute juridiction française vient de casser, par un arrêt du 31 mars 2020 publié au bulletin, un arrêt d’appel concernant la pratique de l’épilation à la lumière pulsée par des franchisés. Cet arrêt de la cour d’appel de Paris du 5 juin 2019 condamnait notamment les franchiseurs Alesia Minceur et Dépil Tech, respectivement à 6 000 et 3 000 euros d’amende pour « complicité d’exercice illégal de la médecine ».
Avec cet arrêt du 31 mars, la Cour de cassation opère un revirement complet de sa position sur le sujet. Jusqu’à présent en effet, elle avait toujours donné raison aux juridictions qui condamnaient franchiseurs, franchisés et esthéticiennes pratiquant l’épilation à la lumière pulsée. Et ce, au nom d’un arrêté de 1962 interdisant aux non-médecins toute forme d’épilation autre qu’à la cire ou à la pince.
Revirement complet de jurisprudence : la lumière pulsée n’est plus interdite aux franchisés
Pour expliquer son changement complet d’orientation, la Cour rappelle d’abord l’arrêt du Conseil d’État en date du 8 novembre 2019. Pour qui l’interdiction de l’épilation à la lumière pulsée (aux esthéticiennes) « méconnait la liberté d’établissement et la libre prestation de services garanties par les articles 49 et 56 (du Traité Européen TFUE) », dans la mesure où elle réserve ces modes d’épilation aux seuls docteurs en médecine.
La Cour relève ensuite que cette interdiction « n’est (en effet) pas justifiée dès lors que les appareils utilisés peuvent être acquis et utilisés par de simples particuliers et que leur usage est autorisé aux esthéticiens pour les soins de photorajeunissement qui présentent des risques identiques à ceux concernant l’épilation. »
Par ailleurs, indique également l’arrêt, « Si l’épilation à la lumière pulsée est susceptible d’avoir des effets indésirables légers (selon l’ANSES, l’agence nationale de santé), et d’être soumise à des restrictions pour des motifs d’intérêt général, il n’en résulte pas que ces actes d’épilation ne puissent être effectués que par un médecin. »
En outre, la Cour retient que « le gouvernement français a notifié à la Commission européenne un projet de décret ouvrant la pratique de l’épilation à la lumière pulsée aux esthéticiens sous certaines conditions de formation. »
Les franchises Dépil Tech et Alesia Minceur ne sont plus condamnées
« Au vu de ces éléments, écrit la Cour de cassation, il y a lieu de revenir sur la jurisprudence antérieure et de considérer que l’interdiction de l’épilation à la lumière pulsée par des personnes autres que des médecins est contraire aux articles précités du TFUE. »
Conséquences : les sociétés Alesia Minceur et Dépil Tech « ne peuvent être légalement condamnées pour complicité d’exercice illégal de la médecine. » L’arrêt de la cour d’appel de Paris en date du 5 juin 2019 est cassé « sans renvoi ». Et le jugement de première instance « perd toute force exécutoire » concernant ces deux sociétés.
Le décret gouvernemental ouvrant l’épilation à la lumière pulsée aux instituts de beauté n’est pas encore sorti. Et les règles encadrant la pratique sont toujours à fixer. Mais les esthéticiennes et les chaînes de franchise du secteur, dont notamment Dépil Tech qui a jusqu’ici été de nombreuses fois condamnée, sont, si l’on peut dire, sorties du confinement judiciaire auquel elles étaient contraintes.