S'ils estimaient qu'il n'y a aucun savoir-faire réel, pourquoi nos franchisés ouvriraient-ils un deuxième ou un troisième magasin ?
Dans un litige vous opposant à un de vos ex-franchisés passé à la concurrence, la Cour de cassation a, le 10 janvier 2008, considéré que la clause lui interdisant de s’affilier à un autre réseau à la fin de son contrat n’était pas valable. Avez-vous, depuis, modifié sur ce point les contrats que vous signez avec vos franchisés ?
Je ne commenterai pas la décision de la Cour, mais il faut savoir que c’est l’aboutissement d’une procédure en référé, où nous avions gagné en première instance. Nous avons eu un conflit avec notre plus ancien franchisé et les relations se sont rapidement dégradées. Il aurait pu attendre la fin de son contrat et se séparer à l’amiable. Ce n’est pas ce qui s’est produit. Nous avons donc, par ailleurs, engagé une procédure sur le fond auprès du tribunal de commerce : ce franchisé [propriétaire de trois points de vente, ndlr], pouvait-il rompre unilatéralement le contrat, ses motifs étaient-ils légitimes ? Il y a lieu d’attendre que ce jugement, pour lequel nous sommes confiants, soit rendu. Ceci étant, ma philosophie n’a jamais été de restreindre la liberté de qui que ce soit, notamment celle d’avoir une activité commerciale et de faire son métier. Un conflit, cela fait partie de la vie. En revanche, il me semble légitime d’avoir le souci de protéger le réseau pour qu’on ne puisse pas rompre un contrat de cette façon et se livrer une concurrence abusive.
La cour d’appel de Versailles, à l’origine de cette décision, a estimé que l’originalité de votre savoir-faire n’était pas suffisante – ou pas suffisamment prouvée – pour justifier une telle clause restrictive de concurrence. Les magistrats vous ont-ils convaincu ?
Je dois dire que je suis (ainsi que mes conseils) toujours totalement perplexe face à cette appréciation. Nous avons contribué à développer en France un concept original. Notre enseigne se développe depuis plus de 10 ans en franchise. S’ils estimaient qu’il n’y a aucun savoir-faire réel, pourquoi nos franchisés resteraient-ils, pourquoi ouvriraient-ils un deuxième, ou un troisième magasin (60 % d’entre eux sont aujourd’hui des multifranchisés) ? J’ajoute – ce n’est pas une révélation – que le savoir-faire d’une franchise ne repose pas uniquement sur la fourniture de produits ou la pose d’une enseigne, mais également sur la qualité des relations qui règnent dans un réseau, sur sa cohésion, ses capacités d’adaptation, etc.
À l’appui de leur décision, les juges ont précisé qu’à l’époque des faits, deux magasins franchisés avaient fermé et que vous avez dû en racheter quatre autres. Qu’est-ce qui explique ces échecs ? D’autres franchisés sont-ils passés à la concurrence et où en êtes-vous actuellement du développement de votre parc ?
Oui, nous avons fermé, au cours des 7 ou 8 dernières années, quelques magasins pour des raisons bien précises. Par exemple, à Reims, pour des problèmes de sécurité qui nous avaient été cachés. Ou encore à Saint-Étienne, parce que nous avions fait une erreur sur la zone de chalandise. Nous avons également repris un point de vente à un franchisé du Nord de la France, qui avait ouvert deux unités, mais n’arrivait pas à les gérer. Cette entreprise est toujours en activité et fonctionne correctement. Tout cela n’a rien extraordinaire… pour un réseau qui atteint aujourd’hui une centaine d’implantations. Depuis deux ans, nous avons accéléré les ouvertures, en particulier en développant un format adapté au cœur des villes. Le rythme est passé d’une quinzaine d’inaugurations par an à 22 en 2007. Et nous espérons en faire autant en 2008.