La cour d’appel de Paris refuse à une affiliée Valège la requalification de son contrat d’affiliation en contrat d’agent commercial. Elle prend ainsi une position inverse à celle suivie dans l’affaire Chattawak, qui lui avait valu le désaveu de la Cour de cassation.
La cour d'appel de Paris vient de prendre une décision significative, dans un litige opposant l'enseigne de lingerie Valège à l'une de ses commissionnaires-affiliées.
Le conflit surgit en 2006. Une affiliée, signataire en 2002 d'un premier contrat à Toulon, puis en 2005 d'un second à Aix-en-Provence, assigne son partenaire en justice. Objectif : obtenir la résiliation de ses contrats aux torts exclusifs de l'enseigne. Dans le même temps, elle cesse les paiements correspondant à la vente des marchandises qui lui ont été confiées. En avril 2008, son entreprise est placée en redressement judiciaire.
Commissionnaire-affiliée ou agent commercial ?
Devant le tribunal de commerce de Paris, elle réclame la requalification de son contrat de commission-affiliation en contrat d'agent commercial et l'indemnité de fin de contrat qui en découle.
Par jugement du 30 septembre 2009, les juges la déboutent de ses demandes, disent que les contrats sont bien des contrats d'affiliation et non d'agent commercial, prononcent leur résiliation aux torts de l'affiliée et la condamnent à rembourser à l'enseigne les sommes dues (de l'ordre de 125 000 euros).
L'affiliée décide alors de faire appel de ce jugement, qui vient devant la cour d'appel de Paris.
On se souvient que, dans l'affaire Chattawak, litige assez semblable, cette même cour avait, à deux reprises, requalifié en contrat d'agent commercial le contrat de l'ex-affiliée d'Annecy. On se souvient aussi, qu'à chaque fois, la Cour de cassation avait cassé ces arrêts, notamment le 29 juin 2010.
Cette fois, la cour de Paris approuve entièrement la décision de première instance. Dans une démonstration très détaillée dont la lecture est édifiante, la cour rappelle d'abord les ressemblances mais aussi les différences entre les deux types de contrats. Puis, elle réfute un à un les arguments de la franchisée.
La cour d'appel de Paris contredit l'affiliée
Le fait que la franchisée ait agi « pour le compte » de l'enseigne « n'est pas contradictoire avec la qualification de contrat d'affiliation ». Le fait qu'elle doive afficher le nom de la marque sur son magasin et ses documents pas davantage (dans la mesure où, contractuellement, le sien doit aussi clairement apparaître). Le fait que les sommes encaissées par la franchisée soient déposées sur un compte sur lequel la tête de réseau dispose d'une autorisation permanente de prélèvement « n'est pas décisif » (dans la mesure, toutefois, où ce compte était au nom de l'affiliée), etc.
Et les magistrats de la cour d'appel de Paris (Pôle 5, Chambre 5) d'en déduire : « Ainsi, la société (franchisée), qui a la qualité de commerçant et exploite un fonds de commerce comprenant une clientèle propre ne peut pas être l'agent commercial de la société Valège ».
D'ailleurs, remarque encore la cour, l'affiliée estime bien elle-même être une commerçante, puisqu'elle explique, en présentant son plan de continuation au tribunal, qu'elle entend céder l'un de ses droits au bail et mettre l'autre en location-gérance.
A l'évidence, la cour d'appel de Paris a choisi de se placer dans la ligne de la position affirmée en matière de commission-affiliation par la Cour de cassation dans l'affaire Chattawak. Car s'il y a bien quelques différences entre les deux litiges, elles n'expliquent pas à elles seules, l'ampleur du revirement.
Selon nos informations, l'affiliée n'a pas encore décidé de la suite à donner à cet arrêt. La probabilité qu'elle se pourvoie en cassation semble toutefois assez faible.
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