Un masterfranchisé apprend que la société du franchiseur principal est dissoute et son contrat suspendu de fait. Mais, à la recherche d’une solution de remplacement, il n’informe pas ses franchisés. La cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion le condamne pour son silence.
Que doit faire un masterfranchisé dont le contrat avec le franchiseur principal s’interrompt sans qu’il l’ait voulu, alors même qu’il est, par ailleurs, en litige avec l’un de ses franchisés ?
C’est la question qu’a eu à trancher dernièrement la cour d’appel de Saint-Denis de La Réunion.
Dans cette affaire, deux contrats de franchise sont signés en 2010 et 2011 entre le master et un franchisé. Ils sont suivis de l’ouverture de deux établissements dans deux villes du département. Mais dès 2013, l’exploitant fait face à des difficultés. Sa société est placée en 2015 en redressement, puis, en 2016, en liquidation judiciaire.
Les deux parties s’affrontent devant la justice. Le franchisé accuse le master de fautes multiples que la cour d’appel, saisie, écarte pour l’essentiel. Mais il lui reproche aussi de lui avoir, pour l’un de ses établissements, fait perdre la possibilité de vendre son fonds de commerce en lui cachant la réalité de sa situation.
Il se trouve que l’ex-partenaire du franchisé a perdu sa qualité de master pour le département de La Réunion en juillet 2013. Or, cet événement – lié à la dissolution de la société du franchiseur principal – n’a pas été porté à la connaissance du franchisé.
Pendant deux ans, de 2013 à 2015, le masterfranchisé a cherché à négocier avec la société qui avait pris la suite du franchiseur principal. En vain, puisque, par un courrier du 4 août 2015, celle-ci lui a fait savoir que sa demande de poursuivre le contrat était devenue caduque.
Le masterfranchisé est condamné à indemniser son franchisé pour lui avoir fait perdre la possibilité de vendre son fonds de commerce
Pour la cour d’appel de St-Denis, le franchisé aurait dû être informé dès 2013, « afin qu’il puisse choisir de rester (…) ou de sortir de cette franchise, avec notamment des possibilités de cession de son fonds de commerce (…) ». Or, il ne l’a pas été. Pour les magistrats « le silence (du masterfranchisé) est constitutif d’une faute à l’égard du franchisé ».
L’ex-master se voit donc condamné à verser 60 000 € à la société du franchisé (estimation de la valeur du fonds de commerce de l’un de ses établissements, sur la base d’un quart du chiffre d’affaires annuel possible). Somme à laquelle s’ajoutent 5 000 € à verser au franchisé lui-même en compensation du préjudice moral subi.
Pour l’autre point de vente, en revanche, dans la mesure où le franchisé en a résilié le bail en juin 2013, soit avant la perte de la qualité de masterfranchisé par son ex-partenaire, la cour considère qu’il n’y a pas lieu à indemnité pour « perte de chance de cession du fonds ».