Parce que la tête de réseau a omis de préciser, dans le DIP remis à son futur partenaire, qu’il serait le premier maillon de sa chaîne, la cour d’appel d’Amiens considère qu’il a été induit en erreur et que le contrat doit être annulé.
La cour d’appel d’Amiens vient de prononcer la nullité d’un contrat de partenariat pour vice du consentement.
Dans ce litige, un contrat de 5 ans est signé fin 2015 mais le partenaire y met un terme, comme il en a la possibilité, fin janvier 2018.
Estimant que la tête de réseau n’a pas respecté ses obligations d’information précontractuelle, il l’assigne en justice demandant la nullité de son contrat et différentes sommes d’argent afin de compenser le préjudice qu’il affirme avoir subi.
Sa société ayant été placée en liquidation judiciaire en janvier 2019, c’est le liquidateur qui poursuit la procédure.
Un contrat de partenariat plus souple et moins coûteux qu’un contrat de franchise
Saisie, la cour d’appel écarte d’abord la requalification du contrat de partenariat en contrat de franchise réclamée par le plaignant.
Les juges relèvent que le contrat contesté garantissait au partenaire l’exclusivité de la distribution des produits de la tête de réseau sur une grande ville, en échange de son engagement à se fournir à hauteur d’au moins 80 % de son offre auprès de ce fournisseur. Jusque-là pas de différence avec une franchise.
Mais la convention prévoyait la possibilité pour chaque partie de résilier le contrat avec un préavis de trois mois, sans avoir à verser d’indemnité. Des dispositions très souples qui ne se pratiquent pas en franchise.
Par ailleurs, l’accord ne prévoyait pas de redevances sur le chiffre d’affaires ou le résultat. Seuls « le coût de l’apprentissage des méthodes de commercialisation » et un droit d’entrée de 3 000 € ont été perçus.
Les juges notent enfin que ce contrat a été conclu « sans concession de nom commercial, marque ou licence », le partenaire affichant sur sa boutique une enseigne en partie commune au réseau et en partie personnalisée et non la marque des produits du fournisseur.
Pour la cour d’appel, les choses sont claires : « si le contrat (contenait) certaines caractéristiques du contrat de franchise, elles (étaient) insuffisantes à permettre (sa) requalification en raison (notamment) de sa souplesse (quant à sa résiliation) et de son caractère peu onéreux. »
Un DIP qui a « induit en erreur » le futur partenaire sur la taille réelle du réseau
La cour accorde en revanche au plaignant la nullité de son contrat de partenariat pour vice du consentement.
Si la tête de réseau a remis à son partenaire un DIP (Document d’Information Précontractuelle) contenant notamment en annexe le dernier bilan et le dernier compte de résultat de sa société ainsi qu’un projet de contrat, il manquait, aux yeux des juges, un élément important.
Concernant la présentation du réseau, le DIP indiquait qu’il « n’était composé que de commerçants indépendants travaillant dans leur boutique pour leur propre compte ».
Seul problème : ce paragraphe ne mentionnait pas que ce réseau n’en était qu’au début de son développement et que la société du partenaire serait le premier maillon de la chaîne.
« Le représentant de cette société a pu croire qu’il intégrait un réseau de commerçants existants », estime la cour. « De sorte que, s’il avait eu connaissance (…) qu’il était le premier partenaire de ce potentiel réseau, il n’aurait pas contracté ou contracté (…) à d’autres conditions. »
La cour d’appel d’Amiens n’a pas considéré – comme d’autres cours d’appel auraient pu le faire – que le plaignant aurait pu se rendre compte par lui-même de l’état réel du réseau pendant les 20 jours séparant la réception du DIP de l’entrée en vigueur du contrat. Elle n’a pas davantage tenu compte contre lui de son expérience passée de franchisé.
Au contraire, aux yeux des magistrats, la formulation du DIP a « pu induire en erreur » le partenaire.
En conséquence, la cour d’appel d’Amiens prononce la nullité du contrat de partenariat et la remise des parties en l’état où elles étaient avant la signature. La tête de réseau devra donc rembourser le droit d’entrée, les stocks, les emballages, le mobilier et les équipements dépensés par le partenaire, soit au total 47 000 €.