Présidente de l’association de franchisés apparue dans son réseau suite aux difficultés rencontrées par plusieurs de ses membres, une franchisée elle-même en échec accuse son franchiseur de ne pas avoir su faire évoluer son concept. Elle est déboutée de toutes ses demandes.
Le 9 juillet 2019 la cour d’appel de Limoges a tranché un litige opposant une franchisée à son ex-franchiseur. En question, notamment, la viabilité économique du concept.
La franchisée en conflit rejoint le réseau en 2012, alors qu’il approche des 150 unités en France après 15 ans d’existence et une réussite jusque là exemplaire. Elle ouvre un premier établissement en juin, puis un second en 2013 dans un département voisin. L’entreprise ne connaît toutefois pas le succès escompté. Au point que, fin 2016, le propriétaire du premier point de vente met fin au bail commercial en raison des loyers impayés. Une résiliation accompagnée d’une expulsion ordonnée par le tribunal de grande instance.
En réponse au franchiseur qui s’adresse alors à la justice en réclamant le paiement de ses redevances, la franchisée assigne la tête de réseau afin d’obtenir la résiliation de son contrat et des indemnités.
Pour la franchisée, la tête de réseau n’a pas su faire évoluer son concept
Pour la plaignante, qui par ailleurs préside l’association de franchisés apparue dans le réseau, son échec est de la responsabilité du franchiseur. Entre autres, parce que la viabilité économique du concept est, selon elle, « absente ». La franchisée estime en effet, comme plusieurs de ses confrères cités par elle, que le dirigeant n’a « pas su le faire évoluer ».
A l’appui de ces accusations, elle produit notamment une liste des établissements franchisés ayant déposé le bilan et/ou étant sortis du réseau ainsi que l’évolution chiffrée de l’activité des points de vente ouverts en 2012 et 2013.
Selon la cour d’appel, des difficultés, même généralisées dans le réseau…
Saisie, la cour d’appel de Limoges ne partage pas son analyse. Certes, les magistrats l’admettent : les documents transmis « démontrent l’existence d’une baisse des résultats entre 2015 et 2016 pour de nombreux établissements, y compris celui exploité (par la franchisée), dont les résultats nets comptables sont déficitaires depuis l’ouverture ».
Mais cela ne les convainc pas pour autant. Selon eux, « même généralisées », ces difficultés d’exploitation ne proviennent pas forcément de « l’absence de viabilité du modèle économique franchisé », même en partie. Pour le prouver, il aurait fallu produire une « analyse approfondie, d’une part de l’évolution du marché du type (d’activité) proposé par l’enseigne et d’autre part de l’évolution des résultats d’exploitation des établissements démontrant que leurs difficultés commerciales ont une origine identique et en lien avec les décisions et la dynamique de la tête du réseau de franchise ».
…ne prouvent pas l’absence de viabilité du modèle économique
« En outre, ajoute la cour d’appel, la remise en cause du modèle de la franchise et la contestation des lignes directrices du groupe à partir de 2014 par la franchisée (et d’autres membres du réseau), ne suffisent pas à démontrer l’existence d’un lien de causalité entre les résultats déficitaires de ces franchisés et des erreurs commises par le franchiseur dans la gestion de l’image de l’enseigne et de l’évolution du concept (… d’autant qu’) au début de l’année 2017, un plan de relance du réseau a été mis en œuvre par le franchiseur, aucune des pièces produites ne permettant de considérer qu’il était mal organisé et inapproprié. »
Les « difficultés incontestables » du franchiseur, placé en redressement judiciaire fin 2017, « n’y suffisent pas (davantage), celles-ci pouvant avoir des causes multiples et complexes. »
Déboutée sur toute la ligne, la franchisée est condamnée
La cour écarte par ailleurs de la même manière les reproches de la franchisée concernant, selon elle, « l’absence d’assistance » de l’enseigne face aux difficultés rencontrées, les prix de vente (quasiment) « imposés », « l’utilisation » de certaines remises arrières des fournisseurs « pour la communication du réseau », etc. Des accusations infondées ou non démontrées aux yeux des magistrats d’appel.
Au total, le jugement de première instance est confirmé pour l’essentiel. La société franchisée est condamnée à verser au franchiseur un peu plus de 100 000 € de redevances dues pour la période 2014-2017. Elle perd en prime les délais de paiement qui lui avaient été accordés en première instance.