Une franchise peut décliner son enseigne en visant des marchés différents… Sans forcément devoir développer un nouveau savoir-faire ni le tester dans un site pilote, estime la cour d’appel de Paris.
La cour d'appel de Paris vient de débouter un franchisé qui demandait l'annulation de son contrat pour vice du consentement et absence de cause.
Ayant adhéré en 2006 à une grande enseigne de services aux particuliers, il était aussi devenu franchisé en 2007 d'une seconde enseigne du même franchiseur, destinée aux seuls professionnels.
Cette deuxième activité n'atteignant – pas plus que la première – le niveau espéré, il l'arrêtait en 2010 et assignait son franchiseur en justice.
Pour lui, la faute du franchiseur était flagrante. Celui-ci n'avait pas ouvert d'établissement pilote pour sa deuxième (et très récente) enseigne, pas délivré de DIP dédié, pas mis au point ni transmis de savoir-faire spécifique et n'avait pas de notoriété sur ce nouveau marché, bien différent du premier.
Quant au prévisionnel transmis, non basé sur une expérience validée, il était selon lui fantaisiste. Là où une douzaine d'établissements existants réalisaient un chiffre d'affaires moyen de 100 000 euros en 2006 et 122 000 en 2007 (données découvertes lors de la procédure) le prévisionnel-type qu'il avait reçu promettait 250, 350, puis 400 000 € pour ses trois premières années.
Pas de savoir-faire et consentement vicié, l'affaire lui semblait entendue.
Nullité du contrat de franchise refusée
Suivant le tribunal de commerce, la cour d'appel de Paris (Pôle 5, chambre 4) en a jugé tout autrement le 12 novembre dernier.
Pour les magistrats, le prévisionnel-type transmis « n'était pas daté et se présentait de manière isolée sans être relié au reste du DIP. » (DIP remis à la fois pour la première et la deuxième enseigne et considéré comme valable par la cour, ndlr). Il n'est donc pas prouvé « qu'il ait pu influer sur la décision du franchisé de conclure le contrat de franchise ».
Par ailleurs, le contrat indiquait un CA minimum annuel de 150 000 euros que le franchisé a presque atteint en 15 mois. Enfin, le franchisé, cadre commercial expérimenté, aurait pu et dû évaluer lui-même la rentabilité du concept « en contactant les autres franchisés » avant de signer.
Quant au savoir-faire, la cour relève qu'il « s'agit de la déclinaison » (à un nouveau secteur) « de l'expérience acquise » (sur le premier). Qu'il est « en partie similaire » pour les deux activités et que la « Bible » transmise « comporte des annexes spécifiques » à la seconde.
Selon les magistrats « un réel savoir-faire a (donc) été transmis ».
Enfin « l'absence de sites pilotes ne démontre pas en soi l'absence de réussite éprouvée du savoir-faire (puisqu'il) avait été expérimenté et était transmis par les premiers franchisés du réseau, déjà en place qui assuraient des formations et animations ».
La nullité du contrat est donc refusée. Le franchisé (qui a poursuivi en solo et ailleurs l'activité de services aux particuliers), est condamné à verser à son ex-franchiseur 12 700 euros de redevances impayées et 30 500 euros d'indemnité contractuelle de rupture.
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