C’est la complémentarité entre les deux enseignes qui nous a permis de reprendre La Grande Récré.
Le 9 juin dernier, JouéClub a été désigné repreneur de l’enseigne La Grande Récré : qu’est-ce qui vous a permis de convaincre le Tribunal de Commerce de Paris ?
JouéClub était tout simplement le seul candidat à proposer une offre de reprise globale portant sur la marque La Grande Récré, le personnel du siège et des points de vente et près de 90 % des magasins intégrés, ainsi que la continuité des contrats de franchise en France et à l’international, et même l’activité de corners dans les stations-services Total.
C’est pour cela que notre offre a convaincu le Tribunal de Commerce de Paris, mais aussi les équipes de l’enseigne et son ancien président, qui était à la manœuvre dans le cadre de la liquidation, ainsi que les représentants du personnel : notre projet a recueilli l’assentiment de toutes les parties.
Combien de points de vente et combien de contrats de franchise avez-vous repris ?
Nous avons repris 89 magasins La Grande Récré en propre sur 101 : nous en avons donc fermé 12, situés en Ile-de-France et en province, en nous basant sur des critères économiques et parfois juridiques. Concernant les magasins fermés à Paris et en Île-de-France, nous avons proposé aux salariés concernés d’être intégrés à un autre point de vente situé dans la région.
Nous avons aussi repris 31 contrats de franchise en France et 17 à l’international : au Maroc, en Afrique de l’Ouest et en Afrique centrale. Soit au total 137 magasins La Grande Récré qui viennent s’ajouter aux 283 points de vente JouéClub, ce qui fait du nouvel ensemble la première enseigne physique sur le marché du jouet, avec 15 % de parts de marché.
Quelques dossiers de magasins La Grande Récré qui étaient, avant leur rachat, en concurrence frontale avec des points de vente JouéClub ont été soumis à l’Autorité de la Concurrence, qui doit rendre son avis d’ici fin 2023. Mais cela ne concerne que très peu de cas, c’est au contraire la complémentarité entre les deux enseignes qui nous a conduits à faire une proposition de reprise : La Grande Récré est un réseau plutôt urbain et implanté en centres commerciaux, tandis que JouéClub est plutôt présent en périphérie ou, avec de petits magasins, en centre-ville. De plus, Jouéclub touche plutôt la famille, avec une offre large, alors que La Grande Récré cible plutôt les enfants, avec une offre plus réduite.
Quelle est aujourd’hui votre feuille de route pour l’enseigne La Grande Récré ?
Le jouet est un marché saisonnier : nous réalisons 55 % de notre chiffre d’affaires sur les trois derniers mois de l’année. C’est pourquoi la reprise de La Grande Récré passe par trois phases. D’abord, parce que l’humain est au cœur du notre projet de reprise, il a fallu bien expliquer le projet et l’organisation aux équipes, afin de les rassurer, leur donner des perspectives et les remotiver. Nous avons aussi échangé avec les franchisés : le fait d’être adossés au leader des spécialistes du jouet avec un projet solide et des moyens financiers en conséquence (le montant de la reprise s’élève à 50 M€) est de nature à les rassurer. Cela nous a permis de ramener de la confiance en interne, en externe et aussi auprès des clients.
Ensuite, il a fallu assurer la reprise d’activité tout de suite et dans les meilleures conditions possibles : réapprovisionner les magasins, expliquer aux fabricants notre ambition, notre projet et nos perspectives… La décision de reprise a été rendue le vendredi 9 juin : dès le lundi 12 juin, nous avons passé les premières commandes. Nous avons aussi procédé à un audit des magasins afin de voir si des interventions de sécurisation étaient nécessaires dans certains points de vente.
Enfin, notre priorité est bien entendu de préparer la saison de Noël, afin de passer toutes les commandes dans les délais impartis et de préparer la communication : le catalogue de Noël se fait dès maintenant.
A partir de 2024, nous pourrons procéder à une analyse plus fine du réseau La Grande Récré, afin de voir s’il faut prévoir une remise au goût du jour de certains magasins.
Comment allez-vous faire coexister l’enseigne La Grande Récré, développée en propre et en franchise, et l’enseigne coopérative JouéClub ?
Ce sont en effet deux modèles complétement différents : notre coopérative se développe grâce aux coopérateurs, qui sont eux-mêmes entrepreneurs et commerçants ; tandis que les enseignes intégrées se développent souvent par la dette. C’est pourquoi, confrontées au Covid, à l’inflation, ou encore à la concurrence internet dans le textile, beaucoup sont placées en redressement judiciaire.
Dans une coopérative, l’intelligence collective au quotidien donne une force pour se positionner, lorsqu’il y a une opportunité de marché, pour pérenniser une enseigne. Cela nous a permis de procéder à une reprise d’activité avec une vraie complémentarité géographique et de positionnement, en nous appuyant sur notre savoir-faire et nos moyens financiers, pour proposer un projet d’entreprise qui fait sens. Comme l’a fait le groupement Intersport en reprenant l’enseigne Go Sport.
Pour faire coexister ces deux modèles, nous avons décidé de créer une filiale de la coopérative pour y loger les actifs issus de la reprise, notamment les magasins : il s’agit de Recreaclub, une société anonyme à directoire et conseil de surveillance. Ainsi, la marque La Grande Récré continue d’exister et nous avons gardé les équipes. Il existe désormais deux entités autonomes, qui ont le même propriétaire, mais deux modes de fonctionnement différents.
Nos priorités d’ici fin 2023 sont de préparer la saison de Noël et de connaître la décision administrative de l’Autorité de la Concurrence. Mais nous réfléchissons bien entendu à 360° sur toutes les hypothèses possibles, y compris à la possibilité pour un adhérent Jouéclub d’ouvrir un magasin La Grande Récré.
Où en est le développement de JouéClub ?
Nous n’avons pas réalisé d’ouverture cette année, car l’équipe développement était mobilisée sur le projet La Grande Récré. Mais il y a eu un transfert de magasin et des cessions à de nouveaux adhérents. Nous n’avons pas seulement pour vocation d’ouvrir, mais aussi d’assurer la pérennité des magasins, par exemple de permettre le repositionnement de certains pour qu’ils soient mieux placés ou plus grands, car c’est un facteur de croissance. C’est pourquoi les créations, les transferts et les cessions sont nos trois axes de développement.