Longtemps porteur, le marché de l’optique entre dans une zone de turbulences. La contraction de la demande et la maturité des parcs obligent les enseignes à repenser leur développement et à ajuster leur modèle.
« Les temps sont durs, les marges ont tendance à diminuer. » (Didier Papaz, président d’Optic 2000). « L’optique est durablement sortie d’une période de croissance confortable. » (Antoine de Roffignac, directeur général de Guildinvest). Après des années de croissance positive ininterrompue, le secteur (plus de 5 Mds€) a clôturé 2009 avec un chiffre d’affaires en hausse de seulement 1%, contre +2,8% en 2008.
Pire, selon le cabinet Xerfi, la dégradation se poursuivra et s’amplifiera en 2010 avec un chiffre d’affaires en repli de -2%. En cause : une contraction de la demande, « un phénomène inhabituel » pour les opticiens dont les rangs ont progressé rapidement depuis 10 ans (plus de 10 000 points de vente aujourd’hui). Cette situation menace la rentabilité de plusieurs grandes enseignes qui ont vu leur développement ralentir en 2009. Pour la première fois depuis des années, le recrutement n’est plus synonyme de croissance pour la franchise Alain Afflelou, ou les coopératives Optic 2000, Atol et Krys, dont le nombre d’unités partenaires a diminué en 2009, malgré des dizaines d’ouvertures.
Les grands acteurs de l’optique en réseau « poussent » leurs autres chaînes. En veillant à leur différenciation. La Guildinvest (1300 points de vente sous 5 enseignes) l’a compris. Avec 827 boutiques, le maillage de Krys est abouti. L’accent est mis sur les marques-sœurs. Depuis 2008, Vision Plus est dotée d’une véritable identité. Le réseau de proximité a retravaillé son concept et porté son parc à 346 magasins (+28 sur un an).
Lun’s Eyewear, joue, elle la carte discount. Lancé fin 2007, ce concept va remplacer Vision Originale, dont le parc plafonnait à 50 boutiques. « Avec Lun’s, nous sommes très clairement orientés vers le low cost », justifie la direction.
Lynx Optique, dédiée aux centres commerciaux, a quant à elle officiellement changé de modèle à l’été 2009, en abandonnant sa formule d’origine, la franchise, pour la coopérative. La tête de réseau, a mis en place de nouveaux outils destinés à optimiser la rentabilité de l’enseigne. Autre objectif : intégrer des opticiens indépendants désireux de s’adosser à un groupe pour bénéficier de conditions d’achats favorables.
Mastodonte du secteur, le groupe Optic 2000 (plus de 1700 points de vente dont 1150 pour Optic 2000 en France et 116 pour Lissac) doit également s’adapter à la conjoncture. Pour gagner de nouveaux clients, la direction a fixé une priorité : s’associer avec les complémentaires santé, qui participent à 50% aux dépenses d’optique en France. Pour accompagner ses adhérents, Optic 2000 met en place de nouveaux outils. Longtemps simple centrale de communication, la tête de réseau se mue en centrale de gestion et fournit des conseils juridiques et fiscaux plus poussés à ses opticiens.
Elle aussi engagée dans une stratégie de renforcement des partenariats, la coopérative Atol (700 magasins en France ; 321 M€ de chiffre d’affaires en 2008) a fixé un nouveau cap : stop à la création à tout-va, priorité aux rachats et à l’intégration de magasins indépendants, notamment en centre-ville. Pour financer ces acquisitions, la direction a instauré un nouveau mode de développement : le cofinancement. Le principe ? Plusieurs opticiens se rassemblent pour financer la reprise d’un point de vente. Le dispositif a récemment été testé à Villeneuve-sur-Lot et doit se généraliser.
Fin de la course aux ouvertures, efforts de différenciation, accompagnement accru aux partenaires franchisés ou adhérents : les enseignes sont bien en train de changer leur monture.