La cour d’appel de Paris vient d’annuler un contrat de réservation de territoire accordé par une enseigne se développant en licence de marque. Motifs : un DIP incomplet et une confusion entretenue avec la franchise.
La cour d’appel de Paris vient d’annuler, à sa demande, le contrat de réservation d’un entrepreneur tenté par une enseigne développée en licence de marque.
La première rencontre a lieu en mars 2012, au Salon de la franchise de Paris. Peu de temps après, le 4 avril, l’enseigne adresse au candidat un DIP (Document d’information précontractuelle) pour une implantation à Versailles.
Le 10 juillet, un contrat de réservation d’une durée de 12 mois est signé contre versement de 29 900 € TTC. Le contrat prévoit classiquement que cette somme sera affectée au droit d’entrée si le point de vente ouvre dans le délai d’un an. Dans le cas contraire, elle sera perdue pour le candidat, au titre de l’indemnité d’immobilisation du territoire réservé.
Mais dans la période, la marque-enseigne propose au candidat un emplacement… à Poitiers. C’est là que le bât blesse. En octobre, le candidat adresse différents courriels (au bailleur de Poitiers et à l’enseigne) qui dénotent sa désorientation. Dans l’un d’eux, il se déclare « circonspect sur la manière dont se déroulent les différents points du dossier ». Et, le 12 décembre, il demande à l’enseigne de lui rembourser la somme versée.
Entre autres motifs pour abandonner son projet il invoque :
-des frais de travaux et de location plus élevés qu’annoncés,
-un investissement trop important au regard de la rentabilité potentielle,
-un emplacement trop éloigné (Poitiers au lieu de Versailles).
Sans réponse de la marque–enseigne, il l’assigne en justice. En mai 2015, le tribunal de commerce de Paris refuse d’annuler le contrat mais condamne la tête de réseau à rembourser à l’ex-candidat la moitié de la somme (14 500 €), avec exécution provisoire.
Une information précontractuelle « imprécise et erronée »…
Saisie, la cour d’appel de Paris (Pôle 5, chambre 5) annule le contrat de réservation.
Pour les magistrats, le DIP remis n’est « pas conforme aux exigences » de la loi. « Incomplet », il « ne comprend pas en annexe les comptes annuels » de l’année précédant la signature du contrat, « ne précise nullement la nature et le montant des dépenses et investissements spécifiques à la marque » auxquels le candidat « devra procéder avant de commencer l’exploitation » et « fait état d’informations anciennes (de 2004) concernant le marché local de l’agglomération de Versailles ».
En outre, l’information précontractuelle délivrée est jugée « imprécise et erronée, en ce qu’elle se réfère tout à la fois à la licence de marque et à la franchise, alors que ces deux modes d’exploitation sont très différents (…) ».
…Et une confusion « entretenue » avec la franchise
« Cette confusion a au surplus été entretenue, notent les magistrats, par la remise, (avant) l’envoi du DIP, (…) d’une plaquette publicitaire se référant exclusivement à la franchise et mettant en exergue les prestations conséquentes d’assistance (de la marque–enseigne) et, (après) la signature du contrat de réservation, d’un livret d’accueil manifestement rédigé à destination des franchisés. »
Si l’intention de tromper le candidat n’est pas prouvée aux yeux de la cour, l’information délivrée par l’enseigne l’a cependant « induit en erreur ».
Une erreur « déterminante pour son consentement », « eu égard d’une part à son caractère substantiel, et, d’autre part, à sa dénonciation récurrente par l’intéressé dans les mois qui ont suivi la signature (…). »
« De sorte que le contrat (de réservation) est entaché de nullité. » Pour la cour d’appel, le candidat doit donc être intégralement remboursé.