Un franchisé parvenu à la fin de son contrat rejoint une chaîne concurrente appartenant au même groupe. Il est condamné par la cour d’appel de Paris à des dommages et intérêts pour non-respect de sa clause de non-affiliation post-contractuelle.
La cour d’appel de Paris a récemment validé, par un arrêt du 26 février 2025, une clause de non-affiliation post-contractuelle contestée par un franchisé.
Dans ce litige, un contrat de franchise de 5 ans est signé en 2017. Mais parvenu en 2022, le franchisé ne réagit pas à la proposition qui lui est faite d’un contrat modifié pour une nouvelle période.
Résultat, le franchiseur annonce à son partenaire le non-renouvellement de leur collaboration. Et donc sa fin à compter du mois d’octobre 2022.
Début décembre de la même année, le franchisé poursuit son activité sous une enseigne appartenant au même groupe. Et ce, en dépit de sa clause de non-affiliation post-contractuelle qui lui interdit de rejoindre un réseau concurrent pendant un an dans ses locaux et dans un rayon de 200 mètres autour.
Le franchiseur l’assigne en justice et obtient sa condamnation en première instance pour non-respect du contrat.
Pour le franchisé, la clause de non-affiliation post-contractuelle était illicite
Devant la cour d’appel qu’il a saisie, le franchisé affirme que cette clause de non-affiliation post-contractuelle est illicite.
D’abord parce qu’il s’agit en réalité d’une clause de non-concurrence pure et simple qui, s’il l’avait respectée, l’aurait empêché totalement d’exercer son activité puisque, selon lui, dans son secteur, l’affiliation à un réseau est une nécessité économique.
Il ajoute que cette clause n’est pas nécessaire à la protection du savoir-faire transmis par le franchiseur. Parce que ce savoir-faire est déjà protégé par la clause de loyauté-confidentialité. Et parce qu’il se réduit à un ensemble de moyens numériques et de signes distinctifs auxquels il n’est plus possible d’avoir accès après la fin du contrat.
Enfin, le franchisé considère que cette clause ne peut pas jouer entre les sociétés d’un même groupe. Parce que les redevances de franchise remontent finalement à la même société. Et parce que, en l’occurrence, l’équipe de développeurs et de techniciens du réseau rejoint est celle qui avait auparavant développé l’enseigne quittée.
La cour rappelle les conditions de validité d’une clause de non-affiliation post-contractuelle
La cour d’appel de Paris ne se montre pas sensible à ces arguments et confirme le jugement du tribunal de commerce.
Les magistrats se réfèrent à l’article 341-2 du code de commerce qui précise les conditions de validité de ces clauses post-contractuelles :
Il faut tout à la fois qu’elles concernent des biens et services directement concurrents, qu’elles soient limitées aux terrains et locaux où l’exploitant exerce son activité, que leur durée n’excède pas un an et qu’elles soient indispensables à la protection du savoir-faire transmis dans le cadre du contrat de franchise.
Comme le franchisé ne conteste que ce dernier point, la cour s’y tient également, puisqu’il suffit qu’il soit défaillant pour emporter la nullité de la clause tout entière.
Pour les magistrats, la clause de non-affiliation post-contractuelle était indispensable à la protection du savoir-faire
Mais précisément, aux yeux des magistrats, le franchiseur a « démontré le caractère indispensable (de la clause en litige) à la protection de son savoir-faire ».
Car le savoir-faire contesté « ne se limite pas à la mise à disposition de logiciels et d’outils numériques ou de signes distinctifs, mais recouvre également une expérience du franchiseur et de son réseau pour l’exercice même de l’activité (…) telle qu’une approche spécifique (des clients) ou la mise en œuvre de procédure d’exploitation spécifique. »
Un « ensemble de connaissances pratiques (…) transmis au moyen de la « bible », mais également au cours des formations dispensées par des franchisés expérimentés, au travers de relations privilégiées avec les membres du réseau et de la valorisation de ce partenariat. »
La clause de confidentialité n’est donc pas suffisante à la protection du savoir-faire transmis. Pas plus que la restitution des outils en fin de contrat.
La société franchisée est condamnée à 24 000 € de dommages et intérêts
Par ailleurs, la société franchisée « ne produit aux débats aucun élément d’appréciation pertinent » prouvant que « l’exercice de son activité ne serait pas pérenne en dehors d’un réseau ».
Enfin, « même si le réseau (rejoint) appartient au même groupe (que l’enseigne précédente), ces sociétés n’en demeurent pas moins distinctes et exerçant une activité concurrente. »
La société franchisée « n’a donc pas respecté (sa) clause de non-réaffiliation portant ainsi atteinte au savoir-faire et à l’identité (de son précédent réseau). »
Elle est condamnée à verser 24 000 € de dommages et intérêts à son ex-franchiseur (soit 80 € par jour multipliés par 300 jours correspondant à la durée d’un an de la clause non respectée).