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      Restauration bio : des franchises à la peine

      Liquidations judiciaires en nombre parmi les franchisés Green is Better et Planetalis. Développement en stand-by pour les autres réseaux du secteur. La restauration rapide saine et équilibrée en franchise peut-elle encore tenir ses promesses ?

      Sérieux déboires pour les franchises qui s'étaient le plus développées

      La restauration « rapide mais saine » n'est pas à la fête. Coup sur coup, en 2012, les deux franchises du secteur qui s'étaient le plus développées ont connu de sérieux déboires. Les bars à salades Green is Better, dont la société franchiseur a été cédée et transférée au Royaume-Uni en avril et les restaurants bio Planetalis placés en liquidation judiciaire en octobre.
      Dans les deux cas, les échecs ont été nombreux. Alors qu'à chaque fois, entre quarante  et cinquante établissements franchisés ont ouvert, beaucoup ont déposé l'enseigne. Chez Green is Better, plus de vingt franchisés ont quitté le réseau (dont quatorze suite à un dépôt de bilan). Chez Planetalis, une vingtaine est également partie, dont la moitié suite à une liquidation judiciaire.
      Les concepts, pourtant, semblaient séduisants. Permettre au consommateur de  déjeuner rapidement tout en se faisant plaisir grâce à des produits sains et naturels, bios pour certains, dans un cadre pimpant ou évoquant la nature; permettre aux franchisés d'investir dans le développement durable, tout paraissait concourir à de futurs succès.
      Mais voilà, en quelques années seulement (trois ans pour Green is Better, sept pour Planetalis), le rêve s'est quelque peu assombri.

      Des concepts « trop intellectuels » ?

      Est-ce à dire que la restauration bio en franchise ne serait pas en mesure de réussir ? C'est, apparemment, un avis partagé par plusieurs experts du secteur.
      « En 2012, indique Bernard Boutboul, directeur du Gira et auteur d'une étude annuelle sur le marché de la restauration commerciale en France, le segment du bio a été le plus touché de toute la restauration en termes de concepts mis en échec (une quinzaine). »
      « Depuis plusieurs années, poursuit le spécialiste, on a vu apparaître, sur ce segment  comme ailleurs, des concepts inventés par des communicants ou des commerciaux extérieurs au monde de la restauration.  Ces concepts ont pu paraître attirants sur un plan marketing, mais ont été en fait trop intellectualisés et ne reposent pas sur de véritables tendances. Le consommateur n'a jamais demandé cela. » D'où, selon lui, la faiblesse de la demande, à l'origine des difficultés rencontrées.

      Problèmes de rentabilité pour les franchisés

      Une faiblesse à laquelle s'ajoute, apparemment, une question de rentabilité. « Globalement les concepts bio, fraicheur, bien manger, manger sain qui se veulent des anti-McDo, et anti-gras sont en échec car les produits sont trop chers à l'achat, explique un fin connaisseur du secteur. Le coût matière avoisine les 40% du chiffre d'affaires au lieu des 30% qui sont la règle pour être rentable en restauration. »
      Une analyse confirmée par certains acteurs économiques eux-mêmes. « On nous a vendu un concept qui ne fonctionnait pas, qui n'était pas rentable », accuse Béatrice Polizzi, ex-franchisée Green is Better d'Aix-en-Provence et présidente du « Collectif Contre Green Franchise » qui regroupe selon elle une vingtaine d'ex-franchisés. « Les achats de produits finis qui nous étaient demandés pesaient trop lourd dans la balance. Les fournisseurs parisiens avaient des coûts de transport trop élevés et on ne nous a pas aidé à trouver leurs équivalents locaux. »
      « Nous nous sommes aperçus que le bio tout seul engendrait un surcoût », reconnaît pour sa part le fondateur de Planetalis, Joseph Paris. Même si elles ne représentaient selon lui au final « pas plus de 20% » des produits proposés dans les restaurants de l'enseigne, ces  lignes « bio » semblent bien avoir pesé sur les comptes.

      Des étapes non respectées

      Les causes des échecs semblent liées aussi à d'autres facteurs. Notamment à la manière de construire le réseau de franchise. « Ils ont démarré la franchise  trop tôt, alors qu'ils n'avaient pas un an d'activité », explique Béatrice Polizzi, ex-Green is Better.
      « Ils nous ont présentés des bilans optimistes (ceux des succursales parisiennes, ndlr), mais il n'y a pas eu d'études de marché locales pour les franchisés, les zones n'ont pas été étudiées. Certains emplacements ont été validés sans avoir été vus. »
      En 2010, alors que le réseau était encore naissant, plus d'une vingtaine de sociétés franchisées ont été créées. Beaucoup trop, visiblement, pour assurer une assistance suffisante à chacune.
      Constat voisin chez Planetalis, où le fondateur reconnaît un développement à la fois « tout azimut », (multiples formats) et « trop rapide » ainsi qu'une sélection des emplacements « pas toujours en ligne » avec la clientèle recherchée…

      Se diversifier pour rebondir ?

      Aujourd'hui, Planetalis est entre parenthèses. Les franchisés qui n'ont pas fermé sont livrés à eux-mêmes. Le fondateur veut toutefois y croire encore et annonce une solution (de reprise) d'ici la fin de l'année 2013.
      De son côté, il entend rebondir avec un autre concept basé sur les burgers, les wraps, les frites et les salades. Avec des coûts et un panier moyen revus à la baisse par rapport à Planetalis (en dessous des 10 euros), une carte et une gestion simplifiées pour les franchisés. Et un seul « format » de développement basé sur la « vente au comptoir ».
      Rien n'est vraiment sur pied, le concept n'a pas encore prouvé sa rentabilité dans un « pilote », mais les corrections apportées au concept initial sonnent comme autant d'aveux des erreurs passées.

      Concept modifié, rythme plus modéré…

      Rachetée par une société britannique, l'enseigne Green is Better vient quant à elle de trouver son masterfranchisé pour la France. Il s'agit de l'ancien franchisé de Clichy (92), auparavant consultant en management, Fabrice Rimblot. Confiant dans la relance du réseau (dont il a initié, en 2011, la centrale d'achat), il revendique 31 établissements en  cours d'exploitation « dont plusieurs tournent au-dessus de 200 000 euros de chiffre d'affaires annuels ». « Pour que cela marche, encore faut-il que les franchisés aient conscience qu'ils doivent faire des efforts et que tout ne peut pas venir tout seul », précise-t-il.
      Optimiste – Fabrice Rimblot estime le potentiel du réseau à 300 implantations dans l'Hexagone-, il corrige toutefois le tir sur le concept en ajoutant aux salades des sandwiches, des soupes et des pâtes (en région notamment), ce qui fait passer la surface du nouveau point de vente type de 45 à 60 m² et le panier moyen de 10,5 à 11 euros. Il explique, de même, qu'il va suivre à l'avenir un rythme de développement « plus progressif », avec deux à trois ouvertures en 2013, puis « 10 à 15 par an ».
      Un conflit judiciaire entre les fondateurs de l'enseigne (désormais installés au Royaume-Uni) et plusieurs franchisés mécontents est par ailleurs en cours. La justice française sera amenée à se prononcer dans quelques mois. Les banques qui ont financé les créations concernées ont également été mises en cause.

      Développement durable ?

      Quant aux autres réseaux du secteur, aucun ne connait un fort développement. Ni ne semble épargné par les difficultés. D'autres litiges sont probables.
      Créé en 1999 et développé en franchise avec prudence depuis 2005, Vivre et Savourer revendiquait, fin 2011, quinze unités, dont treize en franchise. En 2012, deux établissements franchisés ont été placés en liquidation judiciaire. Directeur Général, Christophe Solleret reconnaît que « les temps sont durs », notamment dans les centres commerciaux « dont la fréquentation générale est en recul de 4 à 10 % ». Il affirme toutefois « ne pas craindre » de nouveaux départs…
      Un réseau comme Jour comptait également une quinzaine d'unités fin 2011, dont trois seulement en franchise. Implantés presque uniquement à Paris, sur un positionnement haut de gamme, ces restaurants n'ont apparemment pas conservé l'activité atteinte par certains d'entre eux jusqu'en 2008.
      De son côté, A la Carte, qui déclarait fin 2011 dix établissements, dont neuf en franchise, en aligne trois de moins fin 2012. D'autres enseignes comme Ankka, Gust, Salade & Co ou Sogood ne présentent pas une situation plus convaincante.
      Un bilan malheureusement peu réjouissant. Qui montre combien il peut être difficile, surtout si les conditions économiques générales sont défavorables, de bâtir un réseau de franchise pérenne dans la restauration rapide. Une chose est sûre en tout cas : il ne suffit pas de miser sur des tendances de consommation apparentes, même avec un bon emballage marketing, pour y parvenir.

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