Un franchiseur avait interrompu l’un de ses principaux services – son mandat de ducroire – à l’une de ses franchisées pour cause d’impayés. La cour d’appel le condamne pour décision arbitraire. La Cour de cassation annule cet arrêt.
La Cour de cassation a statué le 11 décembre dernier, à propos d'un litige peu fréquent. Concernant la résiliation, par un franchiseur, de son engagement de ducroire envers l'une de ses franchisées.
Le mandat de ducroire est un système par lequel l'enseigne règle les factures des fournisseurs pour le compte des membres du réseau. Puis se fait rembourser par eux. La centrale n'est toutefois pas perdante, puisqu'elle perçoit, en échange du service rendu, des cotisations (ou des redevances) de la part des affiliés/franchisés et des remises de la part des fournisseurs. Utilisé par les groupements coopératifs, ce système l'est aussi, parfois, par des franchiseurs.
Le ducroire présente des avantages pour toutes les parties. Il peut aussi se gripper… Comme cela s'est produit dans l'affaire jugée.
La franchisée signe son contrat en 2002. Elle connait rapidement des difficultés financières et accumule les impayés à l'égard de son franchiseur. Par deux fois, en 2004 et 2006, le contrat est prolongé en contrepartie d'un échéancier des paiements.
Les relations demeurent toutefois mauvaises, comme les résultats. Les deux parties s'en renvoient la responsabilité. En juin 2008, l'enseigne décide finalement, comme le contrat l'y autorise « en cas d'impayés », de résilier son mandat de ducroire pour cette franchisée. Dont les dettes cumulées (à l'égard de la tête de réseau) avoisinent alors les 200 000 euros.
La franchisée se voit contrainte au dépôt de bilan. Elle réclame le remboursement de redevances, versées, selon elle, sans contreparties. Le tribunal de commerce de Nanterre en 2010, puis la cour d'appel de Versailles, en 2011, la suivent. L'enseigne est condamnée à reverser 110 000 euros à son ex-partenaire. Tandis que sa créance, au passif de la franchisée, se voit limitée à 100 000 €.
C'est cet arrêt, du 7 avril 2011, que la Cour de cassation vient d'annuler. La cour de Versailles avait estimé que la franchisée n'avait pas reçu les sommations prévues avant l'arrêt du service. Elle avait donc sanctionné une « décision arbitraire » de l'enseigne et une « faute majeure portant sur une obligation essentielle du contrat ». Elle devra revoir sa copie.
Les Hauts-Magistrats ont visiblement estimé eux, que les termes du contrat – et notamment la mise en demeure prévue – avaient été respectés. Le droit de l'enseigne à résilier son mandat de ducroire face à des impayés se verra donc peut-être reconnu par la cour de Versailles, autrement composée.
Un franchiseur peut interrompre ses services aux franchisés. Mais il faut que sa décision soit particulièrement justifiée.