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      Droits d’entrée et redevances : quelles contreparties ?

      Dernière mise à jour le 7 juin 2021

      Ce sont des incontournables, ou presque, de la franchise. Mais que couvrent vraiment les droits d’entrée et les redevances d’exploitation réclamés par les enseignes ?

      En France, 86 % des enseignes réclament un droit d’entrée aux candidats qui souhaitent les rejoindre. Une somme variable dont ces derniers doivent s’acquitter au moment de signer leur contrat de franchise. De même, la plupart des réseaux (plus de 3 sur 4) demandent une redevance d’exploitation. Le plus souvent proportionnelle au chiffre d’affaires réalisé par l’adhérent (dans 80 % des cas), celle-ci est due durant toute la durée de son engagement. A quoi correspondent vraiment ces prélèvements ? Leur montant est-il toujours justifié ? Et quels services le franchisé peut-il attendre en retour ?

      « Verser un droit d’entrée, c’est payer pour bénéficier, à un instant T, de l’expérience et du savoir-faire accumulés depuis sa création par une enseigne », résume Philippe Dassié, ex-dirigeant de réseaux, désormais consultant au sein du cabinet Franchise Connexion. « C’est accéder à des process, à des méthodes, à des outils, à des conditions d’achats optimisés. C’est aussi pourvoir s’appuyer sur une structure, ses compétences administratives, juridiques, logistiques, marketing, etc. C’est encore acheter une notoriété et une exclusivité territoriale. C’est, en somme, s’offrir les moyens de devenir, en un temps record, un bon professionnel dans un secteur qu’on ne connaissait pas ».Ce droit d’entrée, aussi appelé redevance initiale forfaitaire (RIF), rémunère également l’assistance à la création de son entreprise apportée par le franchiseur à son nouveau franchisé : fourniture d’un état local et national du marché, mise à disposition des résultats du réseau, d’un modèle de business plan, aide à l’obtention d’agréments quand ils sont nécessaires (métiers de service notamment) et accompagnement à la recherche voire à la négociation d’un local. Souvent, enfin, le coût de la formation initiale du franchisé est inclus, lui aussi, dans la RIF.

      A ces raisons d’être du droit d’entrée en franchise, s’en ajoute une autre. « Il doit aussi permettre au franchiseur d’amortir les dépenses consenties pour développer son concept : frais juridiques de rédaction du contrat, frais de structure, salaire d’un développeur, participation à des salons, publicité… « , explique Philippe Dassié. Un jeune patron d’enseigne qui souhaite commencer à développer son réseau sera obligé d’embaucher un responsable pour gérer son unité pilote, en son absence. Il aura en amont dû déposer sa marque, mettre en place des circuits d’approvisionnement, rédiger un manuel opératoire. Toutes choses qui ont un coût, auquel les franchisés vont participer en versant un droit d’entrée.Stable depuis plusieurs années, le montant moyen du chèque à signer pour rejoindre un réseau tourne autour des 17 000 euros.  Plutôt raisonnable, si l’on considère, comme un certain nombre d’experts de la franchise, qu’une tête de réseau dépense environ 100 000 euros de frais de développement en une année, pour 5 à 6 nouveaux franchisés recrutés. Moyennant quoi ce ticket d’entrée devrait même plutôt se situer entre 20 000 et 25 000 €.

      Parmi les secteurs d’activité les plus abordables en termes de droit d’entrée, on trouve la Beauté/Bien-être (bronzage, amincissement, coiffure, parfumerie…) où il est en moyenne de 8 280 €, puis l’habillement, à 12 192 €, et l’équipement de la maison (literie, cuisines équipées, meuble, décoration…) à 13 691 €. Dans ces domaines les franchiseurs (commettants, concédants…) sont aussi souvent fournisseurs de leurs franchisés. Ils peuvent dès lors se permettre de proposer des droits d’entrée faibles, puisqu’ils se rémunèrent déjà – et financent leur développement –  grâce aux marges pratiquées sur les produits vendus à leurs franchisés. Une pratique qui peut, parfois, « manquer de transparence », relève Philippe Dassié.

      « Ce mode de fonctionnement n’est pas possible, en revanche, dans les services, c’est pourquoi les droits d’entrée y sont généralement plus élevés », poursuit le consultant. Ils sont de fait de 20 010 € dans les services aux entreprises. Ce qui en fait le 3ème secteur le plus onéreux en franchise. « Une position justifiée, estime l’expert. Dans la formation, notamment, le franchiseur transmet un savoir-faire énorme à ses adhérents, ainsi que des contenus et des méthodes auxquels ils ne pourraient accéder seuls ». Suivent la restauration à thème (31 339 €) et la restauration rapide (19 451 €). Avec, dans ces deux cas, une notoriété de marque qui entre souvent en ligne de compte. Les retours sur investissements peuvent par ailleurs y être très rapides et les taux de réussite extrêmement élevés. C’est cette sécurité, aussi, qu’achète alors le nouveau franchisé.

      Globalement, il faut savoir que 14 % des enseignes ne réclamaient lors de notre dernière enquête aucune redevance initiale forfaitaire, 30 % moins de 10 000 € de droit d’entrée, 34 % entre 10 000 € et 20 000 € et 23 % plus de 20 000 €. D’un extrême à l’autre, comment le candidat peut-il savoir s’il paie le juste prix ? « Je lui conseille de commencer par comparer le montant du droit d’entrée réclamé avec ce que lui coûterait une implantation en solo », avance Philippe Dassié. Il doit aussi regarder ce que demandent les autres enseignes du même secteur d’activité, afin de vérifier que le réseau qu’il vise est dans la norme.

      « De manière générale, on ne peut juger la valeur d’un droit d’entrée qu’en regard du retour sur investissement prévu. Si le montant du droit d’entrée est élevé mais que le franchiseur a démontré la forte rentabilité de son concept, il est justifié. A l’inverse, un droit d’entrée très abordable n’est pas forcément une bonne affaire », rappelle le consultant.

      Pour savoir s’il a des chances d’amortir son investissement dans des délais raisonnables, le candidat devra demander à son futur franchiseur d’avoir accès aux comptes de résultats de franchisés installés. Données qu’il complètera en allant rencontrer ces derniers pour recueillir leur ressenti. « C’est imparable. S’ils sont contents de leur sort, c’est que l’investissement en valait la peine. S’ils expriment des réticences, le candidat devra en revanche creuser pour voir d’où elles viennent », conseille l’expert-comptable  Eric Luc.

      Une fois intégré dans le réseau, le franchisé n’a pas pour autant fini de s’acquitter de son droit d’enseigne. Il devra, pendant toute la durée de son contrat de franchise, verser des royalties (aussi appelées redevances d’exploitation) à son enseigne. « Si le droit d’entrée est, comme nous l’expliquions plus haut, le prix d’une expérience et d’un savoir-faire acquis  par le franchiseur à un instant T, celui où le franchisé le rejoint, la redevance d’exploitation rémunère elle la capacité du franchiseur à faire vivre et évoluer son concept, afin qu’il reste pertinent », note Philippe Dassié. Et le consultant de résumer  : « Les royalties sont la mutualisation des frais de fonctionnement du réseau ». 

      Elle couvre ainsi de nombreux postes, depuis l’assistance technique, juridique, commerciale ou administrative fournies par le franchiseur à ses franchisés, jusqu’au travail de Recherche et Développement mené par la tête de réseau pour faire évoluer son offre et son concept en fonction des nouvelles attentes. Les royalties rémunèrent aussi l’animation du réseau : la mise en place d’outils de communication internes, de plates-formes collaboratives permettant aux franchisés de partager leur expérience, de modules de formation continue, la tenue de réunions régionales, de conventions nationales, la visite d’animateurs… Selon notre enquête menée à ce sujet, 94 % des réseaux qui se développent dans l’Hexagone disposent d’au moins un animateur, certains en déclarant jusqu’à plus de dix. Très présents durant la première année d’activité du franchisé, avec des visites au moins une fois par mois (dans 55 % des réseaux), ils le restent ensuite, même à un rythme moins soutenu. Notamment pour vérifier que le concept est bien maîtrisé et les codes de l’enseigne appliqués à la lettre, mais aussi et surtout pour soutenir et guider le franchisé dans l’exercice quotidienne de son activité. Plus de la moitié des enseignes (53 %) utilise en parallèle des challenges pour dynamiser et motiver leurs troupes. Environ 44 % utilisent, enfin, une partie des redevances qui leurs sont versées pour avoir recours à des clients mystères.

      Plus de 3 enseignes sur 4 réclament des royalties. Le système le plus fréquemment retenu (dans 80 % des cas) est celui d’une redevance proportionnelle au chiffre d’affaires, généralement comprise entre 1 % et 5 %.  Une tête de réseau sur cinq préfère le prélèvement d’une redevance forfaitaire fixe (mensuelle ou annuelle), modèle qui, souligne Philippe Dassié, a le désavantage de « pénaliser les petits chiffres d’affaires ». Mais la proportionnelle peut aussi déboucher sur des déséquilibres, cette fois au détriment de ses plus gros contributeurs. « Le système intermédiaire d’une redevance proportionnelle mais dégressive par tranche de CA me paraît par conséquent être le plus juste », explique le consultant.
      Plus de la moitié des franchiseurs (59 %), enfin, demandent aussi une redevance publicitaire. Là encore, elle est en général proportionnelle au chiffre d’affaires, mais cette fois le plus souvent comprise entre 1 % et 3 %. Il s’agit cette fois de la contrepartie des outils marketing et de communication mis à disposition du réseau. Des outils absolument nécessaires, au premier rang desquels figure, depuis quelques années, le site Internet de l’enseigne et ses relais sur la toile : réseaux sociaux, blogs, etc.

      « De nombreux franchisés tirent aujourd’hui un chiffre d’affaires substantiel du site Internet de leur marque, parce qu’il est bien conçu et surtout bien référencé. Et cela, aussi, a un coût », rappelle Philippe Dassié. On pense en particulier à la location automobile, à l’hôtellerie ou aux services à la personne. Et ces secteurs dans lesquels une présence efficace de l’enseigne sur le Web est un atout crucial pour ses franchisés, sont chaque jour un peu plus nombreux. Selon Philippe Dassié, consultant (Franchise Connexion) :

      • Ni les droits d’entrée ni les redevances ne se négocient. D’abord parce que chacun de ces postes correspond à des dépenses objectives du franchiseur. Ensuite, parce que tous les franchisés d’un réseau doivent être logés à la même enseigne.
      • Un jeune réseau pourra toutefois proposer un droit d’entrée minoré à ses premiers franchisés : après tout, ceux-ci prennent le risque d’être des pionniers, et ne bénéficient pas encore de la notoriété de la marque, il est donc normal de les favoriser.
      • De même, de nombreux jeunes concepts ne prélèvent pas de redevances de publicité au départ, prévoyant d’en réclamer une seulement après une ou deux années d’existence ou une fois une certaine taille de réseau atteinte.
      • Par ailleurs, un échelonnement du paiement du droit d’entrée est possible dans certains réseaux, la question peut donc être abordée avec le franchiseur.
      • De manière générale, le candidat est en droit de connaître ce que couvrent précisément les montants du droit d’entrée et des redevances qui lui sont réclamés. La plus grande transparence est requise du franchiseur dans ce domaine.